La vie d’une autre, de Frédérique Deghelt

La vie d'une autre, de Frédérique Deghelt

Les choix de vie

Mais qu’est-ce que je cherche ? Rien de difficile ou de spécial : passer la soirée à écouter de la musique, à partager vraiment le phrasé d’un violon, l’envolée d’une harpe, ou vibrer au son d’une contrebasse. Et puis le reste : la simplicité d’une lecture, une phrase dite les yeux dans les yeux, un silence même… Se jeter dans les bras l’un de l’autre dans un couloir… Marcher toute la nuit dans une ville ensemble… Regarder l’autre avec indulgence, lui accorder du mystère, de la surprise. L’attendre ou le précéder, mais savoir ce qu’on fait de sa vie auprès de lui, pourquoi on es là, ou pourquoi on n’y est pas. 

A force de lire des articles élogieux sur ce roman, j’étais vraiment très tentée de le découvrir à mon tour, d’autant qu’il avait a priori tous les ingrédients pour me plaire, et notamment celui de questionner l’amour, ce qui est, je le rappelle, mon sujet. Et, puisque comme le dit Wilde le meilleur moyen d’éloigner une tentation, c’est d’y céder, j’ai cédé. Pour mon plus grand plaisir.

Et si le nous d’il y a douze ans se réveillait un matin dans la peau du nous d’aujourd’hui, quel regard porterait-il sur les choix que nous avons faits et la vie que nous avons choisie ?

C’est l’expérience étrange qui arrive à Marie, la narratrice. A vingt-cinq ans, elle est engagée par une entreprise de production qui crée des télévisions locales. Le soir même, elle fête son nouveau travail avec des amies, et rencontre Pablo. L’alchimie est immédiate et ils passent la nuit ensemble. Lorsqu’elle se réveille dans ses bras, le lendemain matin, Pablo l’embrasse et lui demande d’emmener les enfants à l’école : stupeur !

Marie pense d’abord que l’homme est quand même un petit peu gonflé, avant de découvrir que les enfants de Pablo sont aussi ses enfants, qu’elle n’a plus vingt-cinq ans mais trente-sept, et que douze années se sont évanouies dans la nuit.

Alors, petit à petit, peu à peu, pas à pas, Marie ramasse les pièces du puzzle qui se sont éparpillées pour comprendre. Comprendre pourquoi elle a choisi d’effacer ses années de vie de couple, pour revenir au jour de sa rencontre avec Pablo. Elle se demande si les choix qu’elle a faits lui conviennent vraiment. Imperceptiblement, le couple, la maternité l’ont changée, mais elle se rend compte aussi que l’amour s’invente quotidiennement, et qu’elle a là une chance de tout reprendre de zéro. Une nouvelle chance.

Le temps qui use

Ce roman m’a totalement cueillie, envoûtée, transportée.

C’est une des meilleures réflexions sur le temps qui passe et qui use, sur l’amour et le quotidien, qu’il m’ait été donné de lire depuis longtemps. Je l’ai lu très rapidement, avec gourmandise.

J’ai aussi beaucoup pensé à cette « chance » qui était offerte à la narratrice de tout reprendre du début, d’oublier ce qui l’avait transformée mais ne lui convenait pas, de retrouver l’enthousiasme et l’innocence de sa jeunesse. Et je me suis dit « pourquoi pas ? ». Il y a douze ans, j’avais vingt ans : que reste-t-il de mes espoirs, de mes rêves d’alors ? Et si une chance m’était donnée de recommencer, que ferais-je ? Un questionnement vertigineux, comme je les aime.

La vie d’une autre (lien affilié)
Frédérique DEGHELT
Livre de poche

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