Se résoudre aux adieux, de Philippe Besson

Je vis le dos tourné à l’avenir. Dans quelle autre ville peut-on faire cela mieux qu’ici ? Tu me reprocheras une fois encore cette incapacité à aller de l’avant, cette complaisance envers le passé, mon goût des souvenirs. Pour toi, je sais bien, l’important, c’est de continuer à avancer. Mais vers quoi pourrais-je avancer aujourd’hui, sinon un gouffre ? Mieux vaut y renoncer si je tiens à ne pas sombrer tout à fait.

La lecture de Vivre vite m’a donné envie, l’autre jour, de me replonger dans ce roman, avec lequel j’ai découvert l’écriture et la sensibilité de Philippe Besson.

Envie irrépressible, je n’ai pas pu différer. Parce que ce roman est arrivé à une étape particulièrement difficile de ma vie : c’était en 2007, je sortais d’une rupture dévastatrice, je me sentais comme Bambi lorsqu’il apprend à marcher, en équilibre extrêmement précaire. Je ne saurais dire si ce livre m’a sauvée, mais en tout cas il m’a aidée, c’est certain.

Louise écrit à Clément, qui vient de la quitter. Des lettres qui resteront sans réponse, mais qu’elle a besoin d’écrire pour se reconstruire, et finir par se résoudre aux adieux.

Le roman exprime parfaitement cette dimension cathartique de l’écriture, ce besoin d’écrire pour apaiser la souffrance, pas seulement amoureuse d’ailleurs, mais de fait, le corps amoureux désespéré est souvent atteint de scriptomanie. Cela fait partie du deuil amoureux, dont toutes les étapes et les plus petits détails sont parfaitement évoqués.

Les mots de Philippe Besson creusent des sillons dans l’âme, il analyse parfaitement les sentiments, le déchirement, l’impression de dépossession, de vide, d’arrachement à soi — cette désespérante certitude que plus jamais on ne sera vivant, et entier.

Louise est dévastée, alors elle recherche sinon la guérison, du moins l’apaisement, par l’écriture, dont finalement le destinataire n’est qu’un prétexte (c’est plus facile, peut-être, de s’adresser à un « tu » identifié qu’à personne), et par l’évasion, le voyage : Cuba, New-York, Venise (drôle d’idée, Venise, pour une rupture, mais après tout…), avant de rentrer à Paris par l’Orient-Express.

Elle voyage pour fuir les mines émotionnelles dont les lieux qu’ils ont traversés à deux sont jonchés, mais en même temps elle est dans le ressassement, l’autopsie d’un amour dont elle décrit parfaitement les petites choses.

Un texte absolument lumineux, qui a quelque chose de la Lettre d’une inconnuemerveilleusement écrit, qui provoque des vagues d’émotions. A lire absolument !

Se résoudre aux adieux (lien affilié)
Philippe BESSON
Julliard, 2007 (10/18, 2008)

23 réponses à « Se résoudre aux adieux, de Philippe Besson »

  1. Avatar de mokamilla

    J’ai adoré ce livre. Lu comme toi après une période difficile.

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    1. Avatar de Caroline Doudet

      Oui, il apporte de la lumière !

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  2. Avatar de lesebooksdemarie

    Je vois que cet auteur écrit des livres bien différents. Je viens justement de lire l’article de « Vivelaroseetlelilas » sur « La maison atlantique »! Maintenant, j’hésite entre les deux… je pense que « Se résoudre aux adieux » peut réveiller des souvenirs douloureux, je ne sais pas si je serai très à l’aise avec ça.

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    1. Avatar de Caroline Doudet

      En fait, non, et pourtant je l’avais lu à une époque douloureuse et je craignais que du coup ça éveille les souvenirs, et pas tant que ça en fait !

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  3. Avatar de Bernieshoot
    Bernieshoot

    C’est un livre qui pourrait, devrait accompagner toutes les ruptures

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  4. Avatar de Violette

    c’est un sans fautes apparemment !

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  5. Avatar de lorouge

    Tu me donnes envie de le lire, je l’avais reçu lors d’une opération promo poche, tu sais 2 achetés, 1 offert… C’est l’occasion en plus de découvrir l’auteur que je n’ai jamais lu

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    1. Avatar de Caroline Doudet

      Si tu l’as, aucune excuse (en plus, il est assez court)

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  6. Avatar de La plume et la page

    Voilà sans doute un très beau roman mais je pense que ce n’est pas le bon moment pour cette lecture vu mon moral en dents de scie ces temps-ci. Plus tard peut-être…

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    1. Avatar de Caroline Doudet

      Franchement, ce n’est pas un roman déprimant, au contraire ! Mais bon…

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  7. Avatar de isabelle

    Je l’ai lu à sa parution mais il ne m’a pas laissé un souvenir émotionnel aussi fort que d’autres livres de Besson comme « En l’absence des hommes », « Son frère », « L’ arrière saison » et « Une bonne raison de se tuer ».
    A vrai dire je ne m’en souviens plus du tout !
    J’ai toujours « Retour parmi les hommes » à lire, il m’attend dans ma bibliothèque mais j’appréhende et remets à plus tard, pourquoi ? Peur d’être déçue ? D’être trop remuée ?

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    1. Avatar de Caroline Doudet
  8. Avatar de Marion

    Il faudrait que je me le relise tiens !

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  9. Avatar de Les Passants de Lisbonne, de Philippe Besson | Cultur'elle

    […] puis, il y a Lisbonne. Le dépaysement qui aide à panser ses plaies et à cicatriser (comme dans Se résoudre aux adieux).  La figure de Pessoa qui plane sur le roman, figure tutélaire de la tristesse et de la […]

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  10. Avatar de « Arrête avec tes mensonges  de Philippe Besson | «Cultur'elle

    […] les masques des personnages, c’était bien lui et ses sentiments qui se dissimilaient : si Se résoudre aux adieux,  par exemple, sonne si juste, c’est parce qu’à travers cette femme qui écrit à […]

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  11. Avatar de De là, on voit la mer de Philippe Besson : l’Amoureux – Cultur'elle

    […] brouille la frontière entre le réel et la fiction, tout comme le fait Louise (la même que dans Se résoudre aux adieux ?) dont on a bien compris qu’elle était un avatar, émotionnel sinon biographique, de […]

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  12. Avatar de Le dernier enfant, de Philippe Besson : le syndrome du nid vide – Cultur'elle

    […] est un de mes écrivains préférés, depuis qu’il m’avait totalement bouleversée avec Se résoudre aux adieux paru au moment même où je vivais une expérience similaire à celle de l’héroïne ; de […]

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  13. Avatar de Les Passants de Lisbonne, de Philippe Besson – Caroline Doudet

    […] puis, il y a Lisbonne. Le dépaysement qui aide à panser ses plaies et à cicatriser (comme dans Se résoudre aux adieux).  La figure de Pessoa qui plane sur le roman, figure tutélaire de la tristesse et de la […]

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  14. Avatar de « Arrête avec tes mensonges » de Philippe Besson – Caroline Doudet

    […] les masques des personnages, c’était bien lui et ses sentiments qui se dissimilaient : si Se résoudre aux adieux,  par exemple, sonne si juste, c’est parce qu’à travers cette femme qui écrit à […]

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    […] brouille la frontière entre le réel et la fiction, tout comme le fait Louise (la même que dans Se résoudre aux adieux ?) dont on a bien compris qu’elle était un avatar, émotionnel sinon biographique, de […]

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    […] est un de mes écrivains préférés, depuis qu’il m’avait totalement bouleversée avec Se résoudre aux adieux paru au moment même où je vivais une expérience similaire à celle de l’héroïne ; de […]

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