Sade, de Benoît Jacquot

J’ai suivi les chemins de traverse quand on voulait m’obliger à la grande route.

Alors que l’on célébrait l’an dernier le bicentenaire de sa mort par plusieurs expositions, le marquis de Sade ne cesse de me fasciner. Pas tant l’œuvre — il y a de grandes choses, mais c’est tout de même souvent assez indigeste — que l’homme, incompris, rebelle et précurseur dans son affirmation à la fois d’un athéisme radical et d’une liberté totale de jouir. Mais je n’avais jamais vu ce film, qui se concentre sur une période particulièrement violente et troublée de l’histoire de France, la Terreur.

En 1794, alors que règne la Terreur, Sade est enfermé à la clinique de Picpus, où d’autres nobles comme lui essaient de survivre et d’échapper à la mort. Si sa réputation sulfureuse le précède, il ne gagne pas moins l’estime de certains de ses codétenus. Il s’attache notamment la jeune Emilie de Lancris, qui ne manque pas d’esprit, et l’initie à sa conception de la vie : profiter de chaque moment qu’elle offre.

Ici, Eros et Thanatos s’affrontent sans cesse. La mort rôde et vient s’afficher jusque sous les fenêtres de la clinique devant laquelle se dresse la guillotine et se creusent les charniers. Chacun, d’un jour à l’autre, peut être appelé et exécuté (certaines scènes sont d’ailleurs assez terrifiantes), et en particulier Sade, qui ne doit son salut qu’à son ancienne maîtresse et au nouveau compagnon de celle-ci, Fournier, un proche de Robespierre.

Pourtant, Sade n’en a cure, et vit pleinement les jours, affirmant plus que jamais qu’il faut jouir de la vie jusqu’au dernier instant, même lorsque la mort toque à la porte. Sans jamais avoir de remords. Alors, il commande des alcools fins, écrit, monte une pièce de théâtre, et se fait l’éducateur de la jeune ingénue que, vieillissant, il ne veut pas déflorer lui-même, mai qu’il initie néanmoins à la sensualité et à la liberté.

C’est un très beau film, qui manque parfois un peu de rythme mais qui parvient à rendre parfaitement tout ce qui constitue la philosophie sadienne : plus qu’une sexualité débridée, ce qui est en jeu ici c’est cette affirmation de la vie jusque dans la mort.

Daniel Auteuil incarne parfaitement le divin marquis et, si je ne suis habituellement pas une grande adepte d’Isild Le Besco, je dois avouer qu’elle est parfaite dans ce rôle d’ingénue libertine qui découvre que les plaisirs de la vie sont plus grands que la peur de la mort, elle qui craignait tant de mourir avant d’avoir vécu.

Sade
Benoît JACQUOT
2000

8 commentaires

  1. Je trouve cette actrice très belle et j’avais oublié ce film que je n’avais pas vu à sa sortie. Du coup je viens de le réserver à la médiathèque (il aurait dû être rendu depuis le 20 juin déjà).

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  2. Marion dit :

    Vu adolescente, je ne m’en souviens pas très bien. Il faudrait que je le revoie à l’occasion…

    Tu as vu celui là :

    http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=27439.html

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    1. Ah non, je n’ai pas vu, je note, merci !

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      1. Marion dit :

        Tu verras… On a envie de sortir Joaquim Phoenix de son engagement envers Dieu 🙂

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  3. Dorothée dit :

    pas vu, mais tentée. As-tu vu Quills, avec Geoffrey Rush ? Il m’a laissé un bon souvenir (mais cela fait très très longtemps, il faudrait peut-être que je le revois !)

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    1. Marion me le signale plus haut : je ne l’ai pas vu, mais c’est noté !

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  4. Dorothée dit :

    je vois dans les commentaires précédents la réponse à ma question 😉

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