Mémoires d’Hadrien, de Marguerite Yourcenar : méditations sur le bord de la tombe

Mémoires d'Hadrien, de Marguerite Yourcenar : méditations sur le bord de la tombe

Et j’avoue que la raison reste confondue en présence du prodige même de l’amour, de l’étrange obsession qui fait que cette même chair dont nous nous soucions si peu quand elle compose notre propre corps, nous inquiétant seulement de la laver, de la nourrir, et, s’il se peut, de l’empêcher de souffrir, puisse nous inspirer une telle passion de caresses simplement parce qu’elle est animée par une individualité différente de la nôtre, et parce qu’elle représente certains linéaments de beauté, sur lesquels, d’ailleurs, les meilleurs juges ne s’accordent pas. Ici, la logique humaine reste en deçà, comme dans les révélations des Mystères. 

J’ai donc décidé de me faire une petite sélection de relectures, et le premier élu fut ce roman que j’avais lu à l’été 1995 (je le sais parce qu’à l’époque, pour une raison que j’ignore mais qui s’avère utile aujourd’hui, j’avais l’habitude de noter la date à la quelle je commençais à lire un livre, ainsi parfois que le lieu), dans une édition qui était déjà vintage à l’époque. En fait, je voulais le relire depuis des mois, mais il se faisait toujours griller la priorité : la situation fait que je lui ai enfin accordé un peu de mon temps.

Au seuil de la mort, l’empereur Hadrien écrit à son petit-fils adoptif et futur successeur Marc-Aurèle, se remémore son existence et médite sur l’amour, la vie, la mort…

Le texte est difficile à résumer, étant plus méditatif et réflexif que narratif, et c’est ce qui le rend unique : philosophique et poétique, écrit dans une langue sublime et rythmée qu’on croirait être du latin traduit, ce roman nous invite à la lenteur et à la réflexion.

A de nombreux niveaux : ce qui est intéressant quand on relit un livre qu’on a déjà lu et qu’on a l’habitude de noter les passages qui nous intéressent, c’est de voir ce qui a changé ou non en l’espace de vingt-cinq ans. Et bien je vous le dit : adolescente, j’avais la même obsession pour la recherche de l’essence du sentiment amoureux puisque j’ai marqué les passages où il en était question (et la personne inconnue qui l’avait lu avant moi aussi), que ce soit dans cette méditation du début dont j’ai cité un extrait en exergue, ou plus loin lorsqu’il aborde son amour pour Antinoüs dont il fait une véritable religion.

L’amour, et la beauté, et quelques réflexions aussi sur la spiritualité et l’ésotérisme. En revanche, je l’avoue : toutes ses considérations politiques m’ont globalement ennuyée.

Bref, un roman dont je me demande s’il ne m’avait pas plus marquée que je ne le pensais. A découvrir ou redécouvrir !

Mémoires d’Hadrien (lien affilié)
Marguerite YOURCENAR
Plon, 1951 (Livre de Poche, 1967)

3 commentaires

  1. Stephie dit :

    C’est un roman que je trouve magistralement écrit mais qui m’ennuie au plus haut point

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    1. Disons qu’il ne s’y passe pas grand chose, c’est de la pure réflexion !

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  2. Harry dit :

    Je me souviens d’avoir lu ce roman un été en Corse, parce qu’une amie très chère l’avait lu. Je m’étais fait après coup le reproche d’avoir emmené un roman sur un sujet « sérieux ». Le sujet l’est en effet.
    Mais c’est toute la patte d’un grand écrivain qui rend intéressant n’importe quel sujet. Elle est comme tous ces écrivains qui traverseront le temps. Je pense la même chose de Soljenitsyne.
    J’ai vraiment passé un bon moment de vacances; je crois que ce roman m’a aidé quelque part à me détendre pleinement.

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