L’effet Zeigarnik et les méandres de la mémoire

Est-ce qu’il vous est déjà arrivé de vous rendre compte que vous aviez complètement oublié la fin d’un film que vous avez pourtant aimé ? De parfaitement connaître vos cours pour un examen, mais de ne plus en avoir aucun souvenir quelque temps après, comme si vous n’aviez jamais étudié cette discipline ?

Si oui, c’est normal, et ça a un nom : l’effet Zeigarnik. Du nom de la chercheuse qui l’a théorisé, Bluma Zeigarnik, qui s’est rendu compte, suite à plusieurs expériences, que l’on se souvenait plus facilement d’une tâche qui a été interrompue que d’une tâche menée à son terme. On oublie ce qui ne sert plus.

C’est encore un coup de notre cerveau : il a besoin de clôture, de connaître la fin (d’une histoire par exemple) et il reste attentif tant qu’il ne la connaît pas. Mais, dès que c’est terminé et que le dossier est complet, cela ne l’intéresse plus, et il oublie.

Scénaristes et marketeurs connaissent bien cet effet Zeigarnik : c’est tout l‘art des cliffanghers dans les séries, et du teasing publicitaire, qui mettent le cerveau en alerte et lui donnent envie d’avoir le fin mot de l’histoire. Et d’ailleurs, c’est dans ma formation au copywriting que j’ai appris le nom de cet effet, et comment s’en servir.

Mais dans la vie ? Comme d’habitude, cette découverte m’a plongée dans des abîmes de questionnements existentiels, cette fois au sujet de la mémoire. J’ai, plutôt, une bonne mémoire, aussi bien au niveau des informations et des connaissances que des événements. Néanmoins, elle a tendance à être sélective. Et je n’avais jamais compris comment mon cerveau faisait la sélection.

Sur le plan des connaissances, c’est évident : mon cerveau retient les informations qui l’intéressent et quelque part considère la tâche comme non achevée, toujours active. En revanche, pour certaines disciplines comme les maths ou la phonétique historique, comme cela ne m’intéresse pas le moins du monde, sitôt l’examen passé le dossier a été refermé (et mis à la poubelle).

Cela me pose néanmoins deux questions. La première est de savoir pourquoi mon cerveau estime utile de se souvenir d’une pub Ricoré des années 80, ou l’intégralité des paroles de Comme un ouragan de Stéphanie de Monaco.

La deuxième concerne le système scolaire : n’est-ce pas une vaste perte de temps de bourrer le crâne des élèves avec des connaissances qui ne les intéressent pas, et qu’ils auront intégralement oubliées deux jours après l’examen ? Le débat est complexe.

Néanmoins, il y a une autre question.

Est-ce que l’effet Zeigarnik peut nous aider à expliquer pourquoi on se souvient de certains événements, et pourquoi on ne se souvient pas de certains autres ? Là, je trouve que c’est plus compliqué. Et pour tout dire, je n’ai pas la réponse : à partir de quel moment peut-on dire qu’un arc narratif de notre vie est clôt et que l’on peut refermer le dossier, quand d’autres très anciens n’ont pas encore trouvé leur résolution et restent ouverts ?

Et j’en suis arrivée à l’idée (peut-être fausse, je ne sais pas) que si écrire permet de se souvenir, c’est aussi parce que cela oblige le cerveau à considérer une histoire comme inachevée. Les dossiers ne sont jamais fermés.

4 réponses à « L’effet Zeigarnik et les méandres de la mémoire »

  1. Avatar de lizagrece
    lizagrece

    Notre cerveau est comme notre ordinateur. Même quand on efface l’historique on peut en retrouver des traces dans le disque dur. Et puis aussi parfois ça bugue !

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    1. Avatar de Caroline Doudet

      Oui, je fais souvent la comparaison. Mais parfois quand c’est effacé, c’est effacé 😉 Il faut bien faire de la place !

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  2. Avatar de cora85

    Merci pour ces informations !

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  3. Avatar de De l’écriture comme de la cuisine : la méthode zettelkasten – Caroline Doudet

    […] et donc remettre sur feu doux (oui, cela peut arriver aussi, c’est l’inverse de l’effet Zeigarnik, chez moi les dossier sont rarement refermés et c’est comme ça que j’ai toujours de […]

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