Et si les hommes avaient (parfois) raison ?

L’autre jour, je suis tombée sur une fascinante enquête statistique sur le ménage. Je n’ai pas de lien, c’était un post Instagram.

Il ne s’agissait pas seulement de la traditionnelle enquête sur la répartition des tâches domestiques dans le couple hétérosexuel : elle avait ceci de particulièrement intéressant qu’elle partait en amont de la conjugalité, et se penchait aussi sur les habitudes des célibataires. Ce qui pourrait, me suis-je laissé dire, être la source du problème.

On y apprenait ainsi que, lorsqu’il sont célibataires, les hommes consacrent 11h par semaine aux tâches ménagères, alors que les femmes y consacrent 16h, soit 5h de plus. Ce chiffre a failli me faire tomber de ma chaise. J’ai compté, et j’en suis arrivée à la conclusion que manifestement, j’étais un homme, alors même que je vis dans un appartement assez grand, quand souvent les célibataires vivent dans de petits espaces. Et que je passe beaucoup de temps à cuisiner et à décorer. Pourtant chez moi, je vous assure, c’est propre et rangé et je n’ai pas honte d’inviter des gens à l’improviste : vous savez combien avoir un lieu de vie accueillant et confortable est essentiel pour moi.

Le chiffre de 11h par semaine, soit environ 1h30 par jour en moyenne, me paraît tout à fait raisonnable et suffisant. On ne parle pas ici, évidemment, des hommes célibataires qui vivent dans une porcherie, juste de ceux qui ont des standards de propreté normaux.

En revanche, 16h, soit un peu plus de deux heures par jour en moyenne me paraît énorme pour une personne seule. Et surtout, cela montre que l’inégalité dans le temps passé aux tâches ménagères n’est pas un problème de couple, ni même un problème lié aux hommes, puisqu’il existe même lorsqu’ils ne sont pas là (je veux dire : ce n’est pas la faute des hommes si les femmes célibataires passent plus de temps à faire le ménage que les hommes célibataires). Par contre, c’est évidemment lié au patriarcat.

J’ai émis une première hypothèse : celle que personne ne faisait appel à une aide-ménagère (ni à sa maman), et que la différence venait des choses faites, et des exigences en terme de perfection.

Je me suis donc lancée à la recherche de ce que certaines femmes (oui parce que j’imagine aussi que je suis pas la seule à avoir une moyenne basse, ce qui implique que d’autres ont une moyenne bien plus haute) faisaient de toutes ces heures en plus qu’elles consacraient à l’entretien de la maison, l’hypothèse étant qu’elles faisaient sans doute des choses que les hommes et moi jugions superflues.

J’ai trouvé assez facilement la réponse sur les réseaux sociaux, la question du ménage étant un thème souvent abordé. Avec, j’y reviendrai, pas mal de jugements de la part de certaines que je qualifierais de maniaques envers celles et ceux qui ne font pas comme elles et qu’elles estiment « sales ».

Elles passent l’aspirateur et la serpillère tous les jours (alors qu’honnêtement, sauf si on se balade chez soi en mangeant des biscottes, et a fortiori si on travaille à l’extérieur, on ne salit pas tant que ça ; de toute façon chez moi c’est le robot qui s’en occupe, merveilleuse invention). Elles font les vitres une fois par semaine (je ne vous donnerai pas mon chiffre). Elles repassent leurs vêtements, mais aussi les serviettes, les torchons et les draps (je ne repasse jamais). Elles essuient la vaisselle (concept que je n’ai jamais compris) alors qu’elle sèche très bien toute seule sur le séchoir après avoir été lavée. Et toute une pléiade d’autres trucs, sans aucun doute.

Ce n’est pas entièrement de leur faute, évidemment : on a tellement fait peser sur les femmes cette idée que leur maison doit être « parfaitement tenue », et elles ont tellement peur du jugement que l’on pourrait émettre sur elles s’il y avait le moindre grain de poussière qui traîne, qu’elles passent leur temps libre à faire le ménage, à traquer la moindre saleté, quand les hommes (et moi) font le minimum pour que ce soit propre et agréable à vivre, mais estiment qu’ils ont des choses plus intéressantes à faire qu’astiquer les vitres toutes les semaines, tant qu’on voit encore à travers.

Et c’est là qu’entre en jeux le patriarcat : l’intériorisation par les femmes (certaines femmes, beaucoup de femmes) d’une exigence de perfection ménagère dont elles ne parviennent pas à s’extirper, et qui a des répercussions non seulement sur leur couple ensuite, mais aussi sur leur épanouissement général, et sur leur carrière, j’en suis convaincue. Tant que les femmes consacreront leur temps à passer une serpillère qui n’a pas besoin d’être passée, elles en auront d’autant moins pour conquérir le monde. Et c’est bien là la base de l’injonction patriarcale aux tâches domestiques : occuper les femmes à des trucs pas toujours utiles et toujours à refaire, comme ça elles n’ont pas de temps à consacrer à prendre leur place dans le monde.

Alors après tout, pourquoi pas : chacune fait bien ce qu’elle veut de son temps (après tout moi j’en passe beaucoup chez le coiffeur et à me maquiller), et chacune fait bien ce qui lui plaît dans sa maison, et si elles tiennent à ce qu’on puisse manger par terre, si ça leur fait plaisir, moi ça me va. Le problème vient lorsque ces femmes jugent celles qui s’octroient davantage de liberté. Parce que, selon moi, ce sont toujours les femmes qui jugent les femmes sur ce point : globalement, les hommes, ils s’en tamponnent un peu, que les vitres soient faites une fois par semaine et que les draps soient repassés. Je crois que la seule chose sur laquelle ils sont tâtillons, c’est la nourriture, et encore, souvent une pizza réchauffée leur va très bien.

Et je l’avoue : cela me crispe. J’essaie d’être bienveillante et de me dire que ce n’est pas leur faute, être jugée sur mon choix de m’émanciper par rapport aux tâches domestiques, tout comme je l’ai fait d’ailleurs par rapport à la maternité (et les deux sont liés) m’agace beaucoup. Parce que j’estime qu’on veut me mettre une pression dont je me passe parfaitement. Que j’ai eue, d’ailleurs : à une époque, lorsque je recevais un homme chez moi, j’astiquais tout du sol au plafond, ça brillait et sentait le détergent, histoire qu’il se dise que j’étais une parfaite fée du logis, en plus de toutes mes autres qualités. Ce n’est plus le cas aujourd’hui : je suis une fée de beaucoup de choses, mais certainement pas du logis, j’assume, et mon appartement les reçoit dans son état habituel. Aucun ne s’est jamais enfui en courant.

J’en arrive donc à cette belle conclusion que sur le sujet des tâches domestiques, les femmes se mettent la pression elles-mêmes, et par la même occasion mettent la pression aux autres, leur conjoint aussi bien que les femmes qui ont décidé de se lâcher la grappe avec ça.

Ce qui nous conduit aux deuxième chiffre : la répartition des tâches dans le couple (hétérosexuel).

Fort logiquement, en couple, le temps moyen passé par les hommes à ces basses considérations matérielles diminue de deux heures. Je dis fort logiquement, car étant donné que le fait d’être deux ne double pas les choses à faire (certaines peuvent prendre un petit peu plus de temps, et le lieu de vie est souvent plus grand, mais changer les draps, que l’on soit un ou deux, c’est pareil), le partage devrait aboutir à une diminution du temps passé au ménage et autres corvées : ce qui est fait par l’un n’est plus à faire par l’autre. On parle bien ici de couple sans enfants, évidemment.

Et bien non, les femmes y passent 7h de plus. Soit 23h. Honnêtement, je ne comprends pas ce qu’elles font pendant plus de trois heures par jour. Vraiment, je ne comprends pas. Mais ce que je remarque, c’est que beaucoup ont tendance a exiger que leur conjoint ait des standards aussi élevés qu’elles en terme de ménage, et soit aussi perfectionniste. Alors que les hommes estiment que beaucoup de choses sont tout de même inutiles, et qu’ils ne les font donc pas. Ou le font à leur manière, et je soupçonne que certaines femmes passent beaucoup de temps à refaire quelque chose qui a déjà été fait, mais pas correctement selon elles. Alors attention, il y a aussi, bien sûr, quelques spécimens flemmards et/ou qui estiment que ce n’est pas à eux de s’en occuper, quelques uns qui font exprès de mal faire pour qu’on ne le leur demande plus, mais globalement je ne suis pas certaine que ce soit le problème essentiel.

Et vous vous doutez bien de ma conclusion, compte-tenu de ma position et du titre de l’article : je crois que sur ce point, les hommes ont raison. Et que les femmes devraient se lâcher un peu la grappe avec le ménage, et consacrer leur temps libre à des choses plus épanouissantes que le repassage (sauf évidemment si elles adorent ça). Oui, c’est important que ce soit propre, mais un peu de désordre, une tasse qui traîne sur le plan de travail et quelques grains de poussière sur les étagères ne sont pas graves ! Et si vraiment la propreté les obsède, qu’elles n’obligent pas leur entourage à se conformer à des standards qu’ils ne comprennent pas.

D’ailleurs, une étude de l’IPSOS (de 2005) tendrait à montrer que les femmes commencent à être conscientes de ce travers : à la question « Si les tâches domestiques ne sont pas équitablement réparties dans votre couple, avez-vous le sentiment que c’est parce que vous êtes trop exigeante et que vous avez du mal à accepter que votre conjoint les fasse à sa manière ? » elles sont 44% à répondre « plutôt oui ».

Et inversement, d’ailleurs : il y a des hommes maniaques de la propreté, et dans ce cas-là, à eux de s’en occuper.

Une réponse à « Et si les hommes avaient (parfois) raison ? »

  1. Avatar de Enfin seule, de Lauren Bastide – Caroline Doudet

    […] ces gestes habituellement dévalorisés que sont la cuisine, le nettoyage ou le rangement, sans obsession du net et du parfait, mais pour avoir un intérieur chaleureux et accueillants pour elle et les autres, car elle […]

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Portrait plan américain d'une femme châtain ; ses bras sont appuyés sur une table et sa maingauche est près de son visage ; une bibliothèque dans le fond

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