Bon. L’heure est grave. Cela fait des semaines que je tourne autour de cet article sans arriver à l’écrire, ce qui a une certaine logique d’ailleurs puisque le sujet, c’est que je ne parviens plus à écrire. Pour la première fois de ma vie. Sauf ici et dans mon journal, s’entend, et encore, dans mon journal, il y a des jours où j’écris juste « il n’y a strictement rien à dire de cette journée ». Même la newsletter c’est difficile, et le mois dernier j’ai dû suspendre la facturation de l’Escale Amoureuse, faute de pouvoir écrire quelque chose de convenable.
Je me sens comme Du Bellay, dans ce célèbre sonnet des Regrets :
Las, où est maintenant ce mépris de Fortune ?
Où est ce cœur vainqueur de toute adversité,
Cet honnête désir de l’immortalité,
Et cette honnête flamme au peuple non commune ?Où sont ces doux plaisirs qu’au soir sous la nuit brune
Les Muses me donnaient, alors qu’en liberté
Dessus le vert tapis d’un rivage écarté
Je les menais danser aux rayons de la Lune ?Maintenant la Fortune est maîtresse de moi,
Et mon cœur, qui soulait être maître de soi,
Est serf de mille maux et regrets qui m’ennuient.De la postérité je n’ai plus de souci,
Cette divine ardeur, je ne l’ai plus aussi,
Et les Muses de moi, comme étranges, s’enfuient.
Pourtant, je ne manque pas d’idées, ni même d’envies. Il y a toujours Le Truc. Adèle m’attend sagement. Mon projet Déesse aussi. J’ai plus ou moins commencé à écrire le deuxième tome des Arcanes du monde (disons que j’ai créé un fichier et écrit trois pages). Je commence à avoir pas mal de notes pour le projet secret. Et je voudrais proposer un deuxième tome à Une année d’écriture.
J’ai des idées, et tous ces projets me font envie.
Ce n’est pas non plus, strictement, une question de temps, même si c’est souvent lui que j’accuse. En fait, c’est plus compliqué que ça, et j’ai identifié deux problèmes, dont l’un est plus épineux à régler que l’autre.
Le premier, c’est que j’étais à nouveau prisonnière d’une vision tunnel, et que j’avais oublié mon pourquoi. J’étais tellement focalisée sur le fait de trouver un moyen de me reconvertir, et donc gagner de l’argent autrement qu’avec mon travail alimentaire, que j’ai fini par oublier pourquoi je le voulais : écrire. Et je finissais par passer mes journées à faire du marketing, ce qui ne laissait plus de place à l’écriture.
Le deuxième problème est lié, ou plutôt, il est à la source du premier : je me sens vide. Je n’ai plus de carburant. Ce n’est pas de temps dont je manque, mais d’élan, d’énergie émotionnelle. Et j’en reviens à ce que je disais au début de l’article : il y a tellement de jours où, dans mon journal, je n’ai strictement rien à dire de la journée que je viens de vivre. Simplement une journée que j’ai vécue sur pilotage automatique, sans rien faire ni d’intéressant ni de nourrissant. Ce qui entraîne le premier problème : je cherche par tous les moyens à construire un quotidien intéressant, où je serai nourrie, inspirée, remplie.
Ce n’est pas un blocage au sens strict. Il n’y a pas de peurs derrière. Mais dans La Bible des artistes (que j’ai failli refaire, mais en relisant les notes de la dernière fois je me suis dit que ce serait encore une stratégie d’évitement), utilise la métaphore du puits ; d’autres utilisent celle du chaudron, de la batterie u du réservoir. En tout cas, quelque chose que l’on remplit et qui nous offre les ressources pour créer.
Mon réservoir est vide, mon âme est affamée. Je ne suis pas nourrie par mon quotidien. Et dès que j’arrive à le remplir un peu, mon réservoir, il se vide aussitôt, comme s’il était percé. Je suis une écrivaine du désir, de la pulsion de vie, j’ai besoin d’être traversée par l’élan pour que les mots coulent. Ils coulent encore puisque je parviens à trouver les ressources pour le blog. Mais il n’y en a plus suffisamment.
Cela dit, il est évident que moins j’écris, moins j’ai d’énergie, puisque ce qui est formidable avec l’écriture, c’est que c’est comme ces moteurs hybrides rechargeables : la batterie se recharge en roulant.
Le diagnostic étant posé, je vous parlerai la prochaine fois de l’ordonnance…









Un petit mot ?