Leçons de bonheur, d’Ilaria Gaspari : que philosopher c’est apprendre à vivre

La philosophie des écoles consistait avant tout en un art de vivre ; un entraînement inflexible destiné non seulement à stimuler l’intelligence du disciple, mais à transformer son existence à travers une série de règles s’appliquant à la pensée et à la vie. De ces règles naît une forme de sagesse qui ne se pose jamais comme alternative au bonheur : au contraire, surtout au sein des écoles fondées dans le sillon de l’enseignement socratique, la sagesse se réalise dans la vie heureuse du savant.

Se replonger un peu dans la philosophie, et en particulier la philosophie antique, par les temps qui courent, ça ne peut pas faire de mal. Montaigne disait que philosopher c’est apprendre à mourir, mais avant, c’est apprendre à vivre. Heureux.

Après une rupture amoureuse, Ilaria Gaspari cherche à guérir son chagrin grâce à la philosophie, mais en revenant à une conception pratique de celle-ci : non un exercice de spéculation théorique, mais bien une manière pratique de conduire sa vie, de trouver le bonheur, et de se connaître soi-même. Elle se lance donc dans un programme de six semaines au cours desquelles elle va s’inscrire aux plus grandes écoles philosophiques de l’Antiquité et vivre selon leurs préceptes : les écoles pythagoricienne, éléatique, sceptique, stoïcienne, épicurienne et cynique.

Contrairement à ce que j’ai cru au début, il ne s’agit pas du tout d’une sorte de défi des 100 jours ou de Bible des artistes sauce philo, mais bien du récit d’un cheminement et d’une expérience personnelle de reconstruction après une rupture : le lecteur n’est (a priori) pas invité à lui-même obéir à ces préceptes. Une expérience éthique et pratique, donc, assez curieuse à suivre à défaut de la reproduire, pleine d’humour et d’autodérision, et qui permet un voyage intéressant à travers la philosophie antique que je connaissais assez mal (le chapitre sur Parménide m’a rappelé mes cours de philosophie d’hypokhâgne et ce n’est pas un très bon souvenir : je ne comprenais strictement rien).

Une sorte de conte philosophique ou d’apprentissage donc, très agréable à lire, et à défaut de s’inscrire à une des écoles philosophiques à proprement parler, on peut en tirer quelques pistes afin de faire des pas de côté et examiner autrement une situation.

Leçons de bonheur. Exercices philosophiques pour bien conduire sa vie.
Ilaria GASPARI
Traduit de l’italien par Romane Lafore
PUF, 2020