Je ne sais pas trop pourquoi (enfin si, en y réfléchissant bien, je sais un peu) l’autre soir j’ai eu envie de revoir ce film qui commence un peu à dater mais qui, s’il ne paye pas de mine, suscite pourtant des interrogations… sans fin.
Phil Connors, présentateur météo sur une chaîne de télévision régionale de Pittsburgh, est comme tous les ans obligé de se rendre, avec sa productrice Rita et un cameraman nommé Larry, à Punxsutawney en Pennsylvanie, pour « le jour de la marmotte », fête réelle qui a lieu le 2 février et qui consiste à observer le réveil d’une marmotte : si elle voit son ombre, l’hiver va encore durer 6 semaines, sinon on aura un printemps précoce.
Le manque d’enthousiasme de Phil est assez visible (et je dois avouer que je le comprends…), et il passe la journée à être odieux avec tout le monde. Mais, lorsqu’avec son équipe il veut regagner le soir même la civilisation, la camionnette est bloquée par une tempête de neige, et ils doivent faire demi-tour.
Et lorsque Phil se réveille le lendemain, c’est pour se rendre compte qu’on est à nouveau le 2 février. Et cette unique journée, il va la revivre un très grand nombre de fois...
L’idée de départ, assez simple, a tout de quelque chose de cauchemardesque, puisqu’en général, il y a peu de chances pour que ce soit une journée sympa qu’on ait à revivre. Mais c’est aussi très philosophique : je ne sais pas vous, mais moi il m’arrive assez souvent d’avoir l’impression de revivre tout le temps les mêmes trucs (pénibles, il va sans dire), même si ce n’est pas forcément la même journée.
Que l’on appelle ça la routine ou, si on prend un peu de hauteur, le cercle du karma (oui oui, n’ayons pas peur) : en effet, l’idée est tout de même ici qu’il y a quelque chose à comprendre, et si le personnage revit sans fin les mêmes situations (comme nous donc dans nos différentes incarnations si on suit les enseignements du bouddhisme), c’est qu’il doit apprendre, progresser, devenir meilleur, corriger ses erreurs afin de sortir de cette infernale boucle temporelle, à laquelle la mort même ne peut mettre fin.
Et c’est bien ce qu’il fait : odieux, égocentrique et misogyne, il finit par devenir un véritable héros qui profite de sa connaissance des événements pour sauver les gens (même si dans les faits ça ne sert à rien puisqu’il doit recommencer le lendemain), et un homme amoureux (et c’est ça d’ailleurs qui lui permet de sortir de la boucle).
Il y a aussi, dans le film, toute une dimension hédoniste, en tout cas au début, puisque Phil peut cueillir le jour sans se soucier du lendemain, puisqu’il n’y en a pas : pendant un moment, on le voit donc s’amuser beaucoup à faire des choses qu’il n’aurait jamais osé faire en temps normal, à cause des conséquences : voler de l’argent, conduire en état d’ivresse.
Parfois, ce qu’il fait est totalement immoral, comme lorsqu’il prend tous les renseignements utiles sur une femme pour le lendemain (enfin, vous avez compris) lui faire croire qu’ils sont allés au lycée ensemble.
Mais parfois aussi, il met à profit ce temps élargi pour des choses qui demandent de la pratique : jouer parfaitement du piano, faire de la sculpture sur glace. Le temps est une notion relative, mais finalement nous en manquons toujours pour faire ce qui nous fait plaisir. Et en voyant Phil en profiter, on ne peut que s’interroger : que ferais-je si, comme Phil, j’étais prise dans une boucle qui me permettrait de faire ce que je n’ai jamais pris le temps de faire ?
Et puis, il est bien sûr question de chemins qui bifurquent et d‘uchronie. Phil a la chance, que nous n’avons jamais, de pouvoir, face à une même situation, tester différentes manières d’agir, pour finir par choisir la meilleure.
Je ne sais pas si ceux qui ont écrit ce film, qui reste avant tout une comédie romantique devant laquelle on rit beaucoup, avaient conscience de toutes ses implications philosophique, mais personnellement, j’ai aimé y réfléchir…
Un jour sans fin
Harold RAMIS
1993









Répondre à 120streetcook@gmail.com Annuler la réponse.