Le Cercle des poètes disparus, de Peter Weir

On lit ou on écrit de la poésie non pas parce que c’est joli. On lit et on écrit de la poésie parce que l’on fait partie de l’humanité, et que l’humanité est faite de passions. La médecine, le commerce, le droit, l’industrie sont de nobles poursuites, et sont nécessaires pour assurer la vie. Mais la poésie, la beauté, l’amour, l’aventure, c’est en fait pour cela qu’on vit. Pour citer Whitman : « Ô moi ! Ô la vie ! Tant de questions qui m’assaillent sans cesse, ces interminables cortèges d’incroyants, ces cités peuplées de sots. Qu’y a-t-il de bon en cela ? Ô moi ! Ô la vie ! ». Réponse : que tu es ici, que la vie existe, et l’identité. Que le prodigieux spectacle continue et que tu peux y apporter ta rime. Que le prodigieux spectacle continue et que tu peux y apporter ta rime… Quelle sera votre rime ?

Je ne sais pas quel âge j’avais lorsque j’ai vu ce film pour la première fois ; guère plus de 12 ou 13 ans, je pense. Je ne sais pas non plus combien de fois je l’ai revu depuis ; plusieurs, en tout cas. Mais je sais une chose : il m’a durablement marquée, j’ai fait mienne cette philosophie du Carpe Diem, quitte à me heurter violemment au réel. Lorsque j’ai appris la mort de Robin Williams, j’ai été profondément attristée et émue, comme beaucoup, et c’est ce film, parmi tous, que j’ai eu envie de revoir.

L’académie Welton, dans le Vermont, a tout des collèges anglais les plus renommés : discipline de fer, exigence de l’excellence, austérité et élitisme. Les parents de la bonne société y envoient leurs fils pour qu’ils y préparent leur entrée dans les plus prestigieuses universités et deviennent banquier, avocat, ou médecin.

Pas de place, ici, pour la fantaisie. Mais l’arrivée d’un nouveau professeur de littérature, John Keating, va faire souffler un petit vent de folie et soulever la poussière…

Film culte de toute une génération, Le Cercle des poètes disparus est une célébration de la vie, de l’amour, de la passion, et de la poésie qui en est l’émanation.

Plus qu’à connaître les poètes, ce que Keating apprend à ses élèves, c’est à vivre poétiquement, à penser par eux-mêmes, à oser, à savourer les mots car ils peuvent changer le monde, à vivre intensément et à refuser le conformisme qu’on veut leur imposer de force : il les révèle à eux-mêmes et leur offre la liberté.

Alors, bien sûr, il y a Neil, qui finit par se suicider parce qu’il ne peut se résoudre à renoncer à cette liberté qu’il a entrevue, et que la réalité est souvent cruelle pour ceux qui ont des rêves ; mais c’est un « suicidé de la société« , et le responsable de sa mort, ce n’est pas Keating, c’est son père, qui veut lui imposer une vie de « lente désespérance », pire que la mort.

La fin est triste, mais pas si pessimiste : certes, la fantaisie perd une bataille contre le conformisme, mais pas la guerre, car il y a Todd, qui finit par s’affirmer dans une désobéissance salutaire et entraîne avec lui ses camarades. Les graines plantées par Keating ne sont pas mortes, elles attendent juste le bon moment pour germer…

Le Cercle des poètes disparus
Peter WEIR
1989

 

29 commentaires

  1. jostein59 dit :

    C’est aussi pour moi, le film qui me vient en tête quand je pense à Robin Williams. Je vais récupérer le DVD et le faire découvrir à mes filles. J’espère qu’il n’a pas trop vieilli et qu’elles apprécieront autant que moi.

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    1. irreguliere dit :

      Non, je ne trouve pas qu’il ait vieilli

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  2. Sandrine dit :

    Un très bon souvenir pour moi aussi.

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    1. irreguliere dit :

      Pour beaucoup

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  3. GentlemanW dit :

    Au-delà de la liberté possible, de la poésie comme levier de vie, des graines de folie incarnées par Robin Williams, c’est une critique froide et véritable de la société. Pire encore avec le temps, avec les décennies où seul l’argent semble être le moteur fou de décisions aberrantes et suicidaires de notre propre société (développement durable aperçue mais non appliqué …), les messages du film semblent plus vraies que jamais.

    Et puis une vie sans fantaisie, c’est un mort qui se lève chaque matin.

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    1. irreguliere dit :

      Exactement !

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  4. cristie dit :

    Je tiens absolument à le revoir avant la rentrée !

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  5. Marion dit :

    Un grand film… Définitivement…

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    1. irreguliere dit :

      Tout est dit

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  6. Sido dit :

    Evidemment ! Ce film a été pour moi un tsunami émotionnel que je ne m’explique guère… Je ne suis pas devenue prof suite à ça mais je le revois toujours avec la même émotion et pour moi aussi, CARPE DIEM reste une devise à suivre. Cette affiche a orné mes différents logements étudiants (avec celle du Grand Bleu) et a fait, un peu, celle que je suis aujourd’hui 😉

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    1. irreguliere dit :

      Oui, il a vraiment marqué beaucoup de monde

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  7. clement dit :

    D’accord sur le fait que c’est un gand film et que Robin Williams y est excellent comme d’habitude, mais je m’étonne que peu de monde n’ait souligné l’ambiguïté du personnage de John Keating. Il apporte un peu de vent frais dans une institution poussiéreuse, mais il n’assume pas sa responsabilité de pédagogue. C’est plus facile pour lui, adulte ayant un emploi, n’ayant de compte à rendre qu’à un directeur d’un collège (qu’il est libre de quitter), d’envoyer balader toutes les conventions de la société, mais il encourage ses élèves à le faire sans prendre en compte leur difficulté. Le rôle d’un pédagogue est bien sûr d’ouvrir l’esprit, mais aussi d’accompagner son élève vers l’autonomie au lieu de le laisser se dépêtrer dans ses contradictions sans aide. Il porte une responsabilité morale dans le suicide de son élève.

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    1. irreguliere dit :

      C’est un point de vue possible, oui

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  8. noukette dit :

    Magnifique ce film… tout comme le roman qui l’a inspiré…

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    1. irreguliere dit :

      En fait, c’est le livre qui a été fait à partir du film. Mais il est magnifique aussi, c’est vrai

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  9. ohoceane dit :

    Je me rappelle avoir vu ce film, ado, je sais que j’ai aimé, mais je ne l’ai jamais revu depuis . Par contre, il m’a fortement poussé à lire les poètes américains, et rien que pour ça, ce film est indispensable !

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    1. irreguliere dit :

      Oui, c’est le second effet bénéfique !

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  10. valmleslivres dit :

    Je fais partie de cette génération qui en a fait un film culte. Je n’ai jamais osé le revoir.

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    1. irreguliere dit :

      On le voit différemment !

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  11. geraldinecoupsdecoeur dit :

    J’ai vu ce film à sa sortie et ce film m’a bouleversée. J’ai du le revoir 10 fois depuis et toujours la même gorge nouée.
    Et 25 ans plus tard, si l’on me demande le titre d’un film marquant, je crois que ce film en fait partie, et je ne citerai pas un film récent.

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    1. irreguliere dit :

      Pareil, je pense, mais j’avoue ne pas avoir trop réfléchi à la question

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  12. cartonsdemma dit :

    Des souvenirs très forts de ce film mais je ne l’ai pas revu depuis, le verrai-je autrement maintenant? Je ne préfère pas tenter.

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    1. irreguliere dit :

      Oui, je comprends…. Je fais pareil avec Belle du Seigneur que je ne veux pas relire

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  13. Mirage dit :

    Film extraordinaire en effet, et qui donna lieu, à sa sortie, à d’assez rudes conflits dans les salles de profs. Une grande majorité d’entre eux, à l’époque, jugea qu’on y voyait un prof totalement atypique, et de surcroît hautement improbable. Sa pédagogie était, à les entendre, pure démagogie, et sous prétexte de poésie, Keating faisait passer ses élèves dans un monde illusoire, inconsistant, inexistant.
    C’est tout l’intérêt de ce film. Bien au delà de « l’enseignement » et des enseignants, il souligne combien toute vie, de la plus médiocre à la plus brillante en apparence, doit choisir. Entre l’insignifiance et la perception véritable de ce qui ne se perçoit qu’au delà des sens. Entre le vide saturé et le manque fécond, qui vous donne soif de la recherche de l’introuvable.
    Apprendre, nous dit Keating, et il s’adresse aux élèves de tout âge, c’est vivre. Et la vie est dangereuse quand on la vit, au lieu de la regarder passer. Elle débouche parfois sur une mort dite tragique, parce qu’elkle est précoce et volontaire. Mais cela ne vaut il pas mieux que de l’attendre dans le lointain, imposée par ce qu’on croit le destin?

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    1. irreguliere dit :

      Je pense que oui !

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