Soyez le poète de votre vie, de Jacques de Coulon : mieux vivre grâce à la poésie-thérapie

Vous n’êtes pas celle ou celui que vous croyez, ce petit être qui s’identifie à un corps vieillissant, à une charge pesante et à tous les masques qui vous limitent. Vous n’êtes pas cet ersatz d’être, conforme à ce que le système attend de vous. Vous êtes infiniment PLUS. Tous les poètes vous le disent. Libérez-vous de vous-même et vivez votre légende personnelle, comme Nerval ! Vous êtes un roi ou une reine dans le jeu de carte de la vie. Vous êtes unique et vous avez tous votre mission à mener, une vraie vie à peindre en couleurs. Vous pourrez alors dire avec Rimbaud : « J’ai tous les talents. » Le poète veut sortir du conformisme et « chercher des secrets pour changer la vie. »

Je ne sais pas pourquoi, malgré mes recherches sur le sujet, je n’étais jamais tombée sur ce petit essai dont le projet est, en tout cas sur le papier, le même que celui du Voyage Poétique : une vie plus pleine et exaltante grâce à la poésie. J’ai même dû, ici où là, utiliser le therme de « poésie-thérapie ». Vous vous doutez bien que j’étais très curieuse de découvrir la proposition de Jacques de Coulon, en espérant qu’elle diffère suffisamment de la mienne pour ne pas avoir l’impression d’être un imposteur. C’est le cas, ne vous inquiétez pas.

Dans cet essai, l’auteur nous invite donc à un voyage poétique vers soi (ça commence bien), qui est aussi un voyage du héros, en douze étapes et trois quatrains, guidés par trois poètes principaux, Rimbaud, Nerval et Baudelaire, que rejoignent ça et là d’autres poètes trop nombreux pour être cités. Premier quatrain, se ressourcer : se mettre en marche, renaître, se recentrer, guérir ; deuxième quatrain, trouver la paix intérieure : s’élever, dilater sa conscience, méditer, retrouver l’Eternité ; troisième quatrain, réinventer sa vie : tisser son identité, rêver, aimer, faire de sa vie un poème.

J’ai pris beaucoup de plaisir dans cette découverte qui vise, on l’aura compris, à apprendre à habiter poétiquement le monde. Il s’agit bien d’un voyage, d’un pèlerinage même, guidé par les poètes, et l’auteur a choisi de donner la parole à trois auteurs particulièrement importants pour moi : Rimbaud, Nerval et Baudelaire, dont je ne me lasserai jamais, ainsi que d’autres comme Rilke, Breton, Daumal, Apollinaire, mais aussi des philosophes comme Nietzsche. Mais, essentiellement, des poètes au sens premier générique, (et aucune femme, comme si la poésie était d’essence masculine) et c’est là la première différence avec ma propre proposition : pour moi, la poésie dépasse le poème. D’autant que, si la métaphore est tentante, je signale au passage que la poésie française ne repose pas sur ses pieds ; elle est syllabique et ce n’est pas la même chose. Ce n’est pas dramatique, mais cet abus de langage a tendance à me crisper.

La deuxième différence, de taille, avec mon travail repose dans les exercices. Ils sont ici essentiellement méditatifs, et il n’y a que peu de propositions d’écriture, ce que je trouve dommage, vu le sujet. Et d’autant plus dommage que tout le reste du propos est très intéressant, bien mené, et invite à de nombreuses réflexions. Même si, et ce sera mon dernier bémol, j’ai trouvé, encore une fois, que certaines remarques concernant le monde actuel étaient assez réactionnaires (toujours sur les mêmes sujets : les écrans, les réseaux sociaux, les nouvelles technologies etc.) et je vais finir par penser que c’est un trait caractéristique de nombreux poètes contemporains. Non, je ne m’exprimerai pas sur la querelle actuelle du petit monde littéraire, je ne fais que constater. Tout comme constater que dans cet essai, les femmes sont les muses du poète, éventuellement, mais jamais créatrice elles-mêmes, ce qui pour moi est aussi pas mal réactionnaire.

Bref. Je me rends compte qu’il y a de nombreuses réserves qui se sont accumulées au fil de l’écriture de cet article, et pourtant, cela reste un essai très intéressant et bien fait, qui m’a nourrie et m’a permis de creuser certains sujets, de découvrir ou redécouvrir de beaux textes, et a semé des graines en moi ! Mais peut-être pour faire autrement…

Soyez poète de votre vie. Douze clés pour se réinventer grâce à la poésie-thérapie. (lien affilié)
Jacques de COULON
Payot, 2009, 2014

La poésie sauvera le monde, de Jean-Pierre Siméon : pour une insurrection poétique

Vivre en poète sur la terre, ce serait simplement cela : lutter pied à pied contre les forces qui poussent à l’exil pour habiter la vie entière et lui demeurer fidèle jusqu’à la mort. Nous n’avons qu’une alternative : vivre chez Circé, en hommes-porcs, une vie morte, ou reprendre le grand large, êtres du désir invincibles aimantés par l’ouvert et amants du plein vent. Vivre en poètes et trouver le sens imprévu ou perdre bientôt notre humanité.

Lorsque je suis tombée par hasard sur ce texte en cherchant autre chose, je me suis dit que c’était tout à fait pour moi. La poésie, le rôle de la poésie dans le monde, le réenchantèlent du quotidien, c’est mon domaine.

Dans ce manifeste, Jean-Pierre Siméon appelle donc à redonner sa place à la poésie, pour nous sauver du cynisme et du désespoir. Une poésie qui est l’objet du mépris ou du déni, alors qu’elle a tout à nous apprendre. Pas seulement le poème, même si c’est dans cet usage particulier de la langue qu’elle trouve son expression la plus pure, mais surtout la poésie en tant qu’elle excède le poème, comme position éthique et état de conscience, une certaine manière d’être au monde faite d’étonnement et d’émerveillement, une transgression et une résistance face aux dérives du monde moderne.

Sur le principe, je ne peux qu’être d’accord, même si le constat de départ me semble un peu sombre, et bien des passages de cet essai m’ont illuminée, chamboulée, ont été surlignés de manière à pouvoir y revenir, et notamment les pages sur le corps, les sens, le charnel qui sont, il faut bien le dire, la matrice de mon rapport au monde.

Pourtant, tout ne m’a pas convaincue et à vrai dire, j’ai trouvé que l’auteur était parfois un peu réac. Deux points en particulier m’ont chiffonnée. La condamnation du narratif d’abord, comme si la poésie elle-même ne racontait pas d’histoires : non seulement le narratif est l’essence même de l’homme depuis la nuit des temps et je suis convaincue que c’est ce qui fait sa spécificité et son unicité, cette capacité à raconter des histoires, et cette narration est au cœur de la poésie, sauf à sortir l’épopée du champ poétique (et même sans l’épopée d’ailleurs, il y a toujours une histoire). Ensuite, la condamnation des images (au sens visuel, pas métaphorique) et en tant qu’être qui se nourrit d’images, je ne peux que m’opposer.

L’autre chose qui m’a un peu chiffonnée, c’est la complexité : je ne suis pas sûre d’avoir tout compris et j’ai trouvé que pointait ça et là un certain élitisme dans les formulation, au sens où le propos, plutôt simple, est volontairement énoncé de manière disons hermétique ou tout au moins complexe. Bien sûr, c’est aussi l’enjeu de cet essai, le travail de la langue, mais cela m’a parfois dérangée s’agissant d’un texte voulant faire de la poésie un art populaire.

Néanmoins, malgré ces points de friction, cela reste un ouvrage intéressant, car il offre une réflexion riche et qui ouvre à de nombreux questionnements.

La Poésie sauvera le monde (lien affilié)
Jean-Pierre SIMEON
Le Passeur, 2015

L’amour est là, qui aime

Je ne vous ai pas beaucoup parlé de ce projet qui est né soudainement un matin, il y a quelques mois. Ecrire de la poésie.

Je l’ai souvent dit : la poésie, pour moi, c’est une manière d’habiter le monde, beaucoup plus vaste que ce que l’on appelle habituellement « poésie », souvent réduite à un genre littéraire. Un genre littéraire que je lis, mais que, jusqu’à présent, je n’écrivais pas.

Jusqu’à un matin, je crois que c’était au mois de juin, peut-être avant (j’ai dû le noter quelque part) : je me suis mise à écrire en vers. Comme si quelque chose s’était débloqué (j’utiliserais bien une métaphore à base de tuyau qui se débouche, mais ce n’est pas très poétique).

Des vers libres. Il n’y a pas toujours de rimes. Certains sont très courts. Ils n’ont rien de renversant mais moi, je les aime. Ce sont bien évidemment des poèmes d’amour, et ils sont intrinsèquement liés au Truc. Et à l’Escale Amoureuse. Le projet est d’en écrire cent, une centaine d’amour. J’en ai dix-sept. Ne soyez pas trop pressés.

En voici deux.

Comme à l’aube le rose se mêle au bleu,
Mon âme se mélange à la tienne
Dans la naissance d’une lumière dorée.

*

Aucun de nous deux n’est mort.
Alors, il n’y a aucune raison de pleurer.
Aucune non plus de désespérer.

Aucun de nous deux n’est mort,
Et l’amour non plus.

Ce n’est qu’à la fin qu’on écrit le mot fin.

L’amour est patient. Il a toute la vie.

Aucun de nous deux n’est mort,
Et dans les recoins de nos âmes, encore,

L’Amour est là, qui aime.

(Oui, j’ai honteusement volé ce dernier vers à Hölderlin, à qui je vole beaucoup de choses).

Réenchanter le monde

Dans Mange, prie, aime, Elizabeth Gilbert raconte sa quête d’elle-même, qui est aussi la quête de son mot. Celui qui la représente. A la fin, elle l’a trouvé. Atraversiamo. Traversons.

Et si toute quête de soi était alors celle-là : trouver son mot. Pas celui de son année, qui change et évolue (celui de mon année 2023 est « pouvoir », celui de 2022 était « harmonie ») mais celui de sa vie.

Longtemps j’ai cru que le mien était “Amour”. En ce moment, “Beauté” revient. Tout le temps. Quoi que j’entreprenne, on me parle de beauté. De son importance fondamentale pour moi. C’est très présent dans mon thème astral, je suis également (c’est logique) tombée dessus en faisant mon human design, avec ce canal 10-59 « créer naturellement la beauté« . L’Impératrice est une carte essentielle pour moi. Et l’autre jour, en faisant un tirage avec le très bel Oracle de la mission de vie, j’ai eu la carte du rêveur : « Ta mission de vie est d’aider les autres à se reconnecter avec la magie de la vie. Tu es une âme qui voit la beauté partout et ta mission de vie est d’éveiller les autres à la beauté de la vie« .

Très vénusien, tout cela. Très poétique. Mon mot, d’ailleurs, pourrait être « poésie ». Mais « beauté » me semble restrictif. Souvent associé à quelque chose de superficiel, et d’ailleurs, pendant très longtemps, je me suis connectée à cette part de moi par des recherches autour de la parure. Mais cela va plus loin, car il ne s’agit pas seulement de visuel. C’est tout un ensemble, et pas uniquement sensoriel, même si c’est essentiel. C’est aussi métaphysique et spirituel.

Le kalos kai agathos (καλὸς καὶ ἀγαθός) des Grecs.

Mais dans le monde dans lequel nous vivons, « beauté » n’atteint pas, en tant que mot, son plein pouvoir expressif.

En fait, je crois que mon mot, c’est “émerveillement”, et les deux précédents (Amour et Beauté… vous comprenez pourquoi je cherche à exprimer mon mot autrement ?) y participent. C’est habiter poétiquement le monde. Et, pleinement, réenchanter le monde. Ce qui n’est pas une mission facile en ce moment, même si elle me plaît beaucoup !

Et vous, quel est votre mot ?

Instantané : nuances de roses

La semaine dernière, j’étais passée, mais un peu vite, devant une affiche annonçant une manifestation autour de la rose. Mais je n’avais pas pu voir où elle avait lieu, et le temps de rentrer chez moi, j’avais oublié le nom, et je n’avais donc pas pu la retrouver sur Internet, ce qui m’avait un peu agacée (surtout quand on sait le nombre de trucs totalement inutiles que retient mon cerveau) mais enfin, j’étais passée à autre chose.

Et dimanche matin, je me suis levée avec l’envie subite d’aller au jardin des plantes profiter des dernières chaleurs de l’été. Il faisait très beau, après une semaine automnale, j’ai enfilé une jolie robe et des sandales, et me voilà partie. Et, bien sûr, je suis tombée sur l’événement que je cherchais : j’ai vraiment bien fait encore une fois d’écouter mon intuition, car je me suis régalée dans tous les sens du terme. J’ai pu profiter du jardin, de ses couleurs et de ses odeurs, de la serre où je n’étais jamais entrée et où j’ai pu admirer de superbes aquarelles botaniques et des compositions florales autour de la reine des fleurs. J’ai aussi dégusté une crêpe sur un banc, au soleil, et c’était merveilleux.

Encore un dimanche où mes cinq sens ont été satisfaits : la beauté, les odeurs, le chant des oiseaux, la caresse du soleil, le bon goût de la crêpe. C’est ça, comme je vous le disais hier, habiter érotiquement le monde !

Sonnets Portugais, d’Elizabeth Browning : la surprise de l’amour

Aimé, mon bien,
Qui vins à moi quand le monde avait fui,
Et moi qui cherchais Dieu seul, t’ai trouvé !
Je te trouve, suis sauve, et forte, et heureuse.
Tel celui qui debout, dans l’asphodèle,
Se retourne sur le temps pénible passé
Sur terre – ainsi moi, le sein gonflé,
Je témoigne, ici, entre bien et mal,
Que l’Amour, comme la Mort, sauve également.

J’en parlais brièvement la semaine dernière, de ces Sonnets Portugais qui ont illuminé mon début d’année : 44 sonnets (suivi dans cette édition de quelques autres poèmes). Des sonnets d’amour, qui ont ceci de fascinant qu’ils montrent la lutte désespérée contre le sentiment amoureux qui, lui, est bien décidé à prendre toute la place : d’abord surprise (c’est le poème que j’ai partagé avec vous l’autre jour) par l’amour qui lui tire les cheveux (j’adore cette image), elle s’estime indigne de son poète d’amoureux, elle ne se sent pas belle, indigne, trop vieille… et puis, petit à petit, elle cède, dépose les armes, accepte cet amour pur qui la libère.

Chaque poème est une petite pépite qui s’adresse directement à l’âme, et beaucoup m’ont mis les larmes aux yeux tellement ils touchaient juste. Si vous ne connaissez pas et que vous aimez lire de la poésie, n’hésitez pas !

Sonnets Portugais
Elizabeth BROWNING
Traduit de l’anglais par Lauraine Jungelson
Poésie/Gallimard

Nous y sommes : invitation à un voyage poétique !

Hier était le grand jour : la publication de mon site Le Voyage Poétique. Si vous me suivez sur Instagram, ou si vous êtes curieux et que vous avez déjà cliqué sur ce nouvel élément du menu, vous l’avez peut-être déjà visité. Sinon, et bien je suis ravie de vous y inviter.

C’est une première étape, et après des mois de travail acharné, d’abîmes de questionnements métaphysiques et existentiels, de peurs, d’agacements, de tâtonnements, de remises en causes, de nouvelles idées, d’apprentissages, de doutes, de choix épineux… c’est une grande étape.

D’ici quelque temps je vous ferai un article plus détaillé sur le cheminement : aujourd’hui, j’ai juste envie de partager cette naissance avec vous, en espérant qu’il vous plaise !