Un peu chiffonnée par ma récente déception avec Colette, je me suis replongée dans Les Vrilles de la vigne, et je suis retombée sur ce magnifique passage sur le changement et le fait de vieillir, que j’ai eu envie de partager avec vous aujourd’hui !
Enchantée encore de mon rêve, je m’étonne d’avoir changé, d’avoir vieilli pendant que je rêvais… D’un pinceau ému je pourrais repeindre, sur ce visage-ci, celui d’une fraîche enfant roussie de soleil, rosie de froid, des joues élastiques achevées en un menton mince, des sourcils mobiles prompts à se plisser, une bouche dont les coins rusés démentent la courte lèvre ingénue… Hélas, ce n’est qu’un instant. Le velours adorable du pastel ressuscité s’effrite et s’envole… L’eau sombre du petit miroir retient seulement mon image qui est bien pareille, toute pareille à moi, marquée de légers coups d’ongle, finement gravée aux paupières, aux coins des lèvres, entre les sourcils têtus… Une image qui ne sourit ni ne s’attriste, et qui murmure, pour moi seule : « Il faut vieillir. Ne pleure pas, ne joins pas des doigts suppliants, ne te révolte pas il faut vieillir. Répète-toi cette parole, non comme un cri de désespoir, mais comme le rappel d’un départ nécessaire. Regarde-toi, regarde tes paupières, tes lèvres, soulève sur tes tempes les boucles de tes cheveux : déjà tu commences à t’éloigner de ta vie, ne l’oublie pas, il faut vieillir !









Un petit mot ?