Comment les femmes parlent de sexe lorsqu’elles sont libres de le faire ?
I think that’s key : fantasy can help crystallise our wants and needs. It can free us to explore ourselves, to experiment our arousal and our desire without risk of harm or criticism. Fantasy is a self space; it is not necessarly what we wish was teal. Crucially, in a fantasy we don’t need anyone’s permission other than our own: a fantasy is a deliberate, and usually entirely private, act of both memory and imagination.
Il y a des livres dont j’attends des mois (voire des années) pour les lire, même s’ils m’intéressent. Et il y a ceux sur lesquels je me précipite le jour même de leur sortie et que je lis dans la foulée. Want fait partie de ces derniers : pour tout dire, je n’ai même pas attendu qu’il soit traduit pour me le procurer, tant le sujet, celui des fantasmes, et la manière dont il était traité, des récits d’anonymes, m’intéressait. Si on ajoute à cela le rôle prépondérant de Gillian Anderson, que j’aime infiniment, en tant qu’actrice et en tant que femme engagée, il n’y avait pas moyen de résister.
Want est une invitation à explorer les fantasmes sexuels de femmes anonymes tout autour du monde, par le biais de lettres qu’elles ont envoyées et qui sont la matière du livre. Comment les femmes parlent de sexe lorsqu’elles sont libres de le faire ? Quels sont leurs fantasmes les plus secrets ? A quoi pensent-elles lorsqu’elles veulent un orgasme à coup sûr ?
Il n’y a évidemment pas de réponse unique et c’est ce qui est fascinant avec ce recueil : la variété, la multiplicité, l’unicité, même si le recueil propose une sorte de classement thématique : certaines veulent être dominées, d’autres adorées comme des déesses, d’autres dépasser les limites, faire des plans à plusieurs, faire l’amour avec un inconnu, regarder ou être regardées, explorer ce qu’on appelle perversions. Certaines veulent simplement être aimées, car tous les fantasmes ne sont pas sexuels.
Est-ce représentatif des désirs féminins au XXIe siècle ? Je n’en suis néanmoins pas si certaine que cela : évidemment, le principe repose sur le volontariat. Tout en restant anonymes, les femmes ont néanmoins été invitées (mais pas obligées : certaines ne le font pas ou gardent certaines données secrètes) à indiquer leur origine ethnique, leur religion, leur salaire, leur orientation sexuelle, leur statut relationnel et si elles ont des enfants ou non. Par leur âge bizarrement, mais certaines l’indiquent dans leur lettre. Et un truc m’a sauté aux yeux : c’est le nombre assez important de femmes gagnant plus de 100000$ par an, nombre largement supérieur à la proportion réelle. Idem d’ailleurs pour la religion. Et je pense qu’il y aurait quelque chose à creuser du côté des tabous. N’y-at-il pas des données sociologiques qui rendent les femmes plus enclines à livrer leurs fantasmes ? Et cela influe-t-il sur le type de fantasme qui est raconté ?
En tout cas, tous ces fantasmes n’ont pas vocation à devenir réels. Certains sont d’ailleurs irréalisables en pratique. D’autres sont idéologiquement incorrects pour celle qui le fait, et c’est bien là d’ailleurs ce qui est intéressant : nos fantasmes nous poussent parfois dans nos retranchements, et nous sommes excitées par des choses que nous ne voudrions certainement pas vivre. Les fantasmes, comme les rêves, sont une manifestation de notre inconscient, on ne peut pas aller contre : ce qui nous excite nous excite, mal gré qu’on en ait. Au contraire, ce qui ne nous excite pas ne nous excite pas. Le chapitre kink par exemple m’a mise assez mal à l’aise (sans jugement aucun) et comme d’habitude toutes les scènes entre femmes m’ont laissée de marbre. Certains fantasmes peuvent d’ailleurs être des triggers.
A travers ce recueil, une certitude : l’érotisme est un outil de connaissance de soi. Tout comme l’écriture de ces fantasmes, qui a sans doute une dimension thérapeutique et cathartique : révéler ce que depuis toujours on tient comme le plus secret des secrets. Dans le fantasme on ne peut pas se mentir. Nos fantasmes nous indiquent ce qui veut croître en nous, ce que nous devons explorer, approfondir, et peut-être, aussi, guérir. Mais pas toujours au sens littéral.
Fascinant sur le fond, donc, ce recueil est aussi intéressant sur la forme. Certains textes sont très courts, d’autres au contraire se déploient, et constituent de véritables nouvelles : nombre de participantes ont d’ailleurs un vrai talent littéraire dans le domaine, et devraient continuer à écrire. Quant aux introductions de Gillian Anderson, elles sont d’une intelligence rare.
En tout cas, je pense que ce recueil va pas mal nourrir l’Escale Amoureuse dans les prochains mois : j’ai pris beaucoup de notes, eu beaucoup d’idées d’exploration et de questionnement, quelques idées de textes aussi, il s’agit donc d’une affaire à suivre ! J’ai aussi appris beaucoup de choses : la lettre d’une femme asexuelle, par exemple, m’a particulièrement intéressée parce qu’elle explique, justement, ce que c’est que d’être asexuelle, ce qu’elle ressent et ne ressent pas, et c’est littéralement passionnant !
Une note sur la langue : c’est de l’anglais plutôt accessible, mais de toute façon, il est déjà sorti en français !
Want (lien affilié) / Nos Désirs (lien affilié)
Gillian ANDERSON
Bloomsbury, 2024 / Denoël, 2024









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