L’inspiration vient en marchant sur un tapis

J’aime beaucoup marcher, que ce soit en ville ou dans la nature. Malheureusement, c’est une activité à laquelle je ne peux pas tellement me livrer en ce moment : il pleut littéralement tous les jours depuis des mois (même si, à l’heure où j’écris ces lignes, il fait miraculeusement beau depuis deux jours), et je ne suis ni un escargot, ni anglaise. Du reste, je n’ai matériellement pas le temps de sortir marcher tous les jours. Bref, le résultat était que mon nombre de pas quotidien était insuffisant, et que pour remédier à ce problème, j’ai demandé à Santa de me mettre un tapis de marche sous le sapin. Ce qu’il a gentiment fait.

Ma nouvelle habitude quotidienne est donc de faire une séance de marche sur mon tapis. Plus ou moins longue selon le temps dont je dispose, et ce que j’ai fait d’autre dans la journée. A l’origine, j’avais envisagé d’acheter une table haute, pour pouvoir travailler en même temps, mais je me suis rendu compte que ça allait être compliqué : c’est possible si on met le tapis à vitesse lente, mais je préfère en mode plus sportif, à la limite de la course. Sinon il faut y rester deux heures et je me connais, ça va m’agacer.

A la place, je me suis donc mise à regarder des vidéos de promenade. C’est très bien fait, ces trucs : les vidéos sont tournées en caméra subjective, et même si cela ne remplace évidemment pas une véritable promenade dans la forêt, c’est plutôt agréable. La raison pour laquelle je ne mets pas de séries est que le tapis fait trop de bruit, il faudrait que je mette le son beaucoup trop haut. Et du reste, je ne suis pas du tout attentive : mon esprit vagabonde.

Parmi toutes ces vidéos de promenades, mes préférées sont celles qui se déroulent dans l’univers d’Harry Potter, ou plus exactement un univers magique inspiré d’Harry Potter. On visite des forêts dans lesquelles les champignons sautillent à notre passage pour nous dire bonjour, des laboratoires d’apothicaires et vendeurs de potions, des châteaux inspirés de Poudlard, et on croise, au détour des chemins, centaures, fantômes et magiciens.

Et l’autre jour, il s’est produit un truc magique. J’utilise ce mot à dessein, car cela relève de la Grande Magie telle que la décrit Elizabeth Gilbert dans Big Magic. J’étais sur mon tapis, à moitié regardant la vidéo, à moitié l’esprit vagabondant ici et là, quand soudain, tout le début du deuxième tome des Arcanes du monde, après lequel je courais depuis des mois, s’est écrit tout seul. Pour tout dire, il est sorti tout armé de ma tête, comme Athéna de la tête de Zeus.

Alors dans les faits, ce n’était pas très pratique : je ne voulais pas interrompre ma séance de marche (d’autant que cela risquait de tarir le flot), et comme ensuite j’avais un rendez-vous, j’ai dû tout dicter à mon téléphone une fois la séance terminée. Mais j’ai été fascinée par le déroulé : bien sûr, des fulgurances de ce type, j’en ai déjà eues (dans mon lit au moment de m’endormir, sous la douche, en conduisant : toujours des moments peu pratiques), mais jamais aussi longues et complètes. Et jamais, bizarrement, en me promenant : lors d’une véritable promenade en extérieur, je pense que mon esprit est beaucoup trop accaparé par mon environnement extérieur, par les multiples sollicitations sensorielles, beaucoup trop en état de vigilance poétique, pour flotter et être ouvert à l’inspiration subite (ce qui n’est pas le cas lorsque je prends ma douche…).

Pour que l’inspiration survienne magiquement, je crois qu’il faut une certaine dose d’ennui. Et lorsque je me promène réellement, je ne m’ennuie pas. Je ne dis pas que je n’ai jamais des idées qui viennent, des problèmes qui se résolvent dans ces moments-là, mais jamais de cette manière.

Je pense que ce qui s’est produit, c’est la rencontre entre l’immersion dans un univers finalement semblable à celui de ma série, un esprit flottant car ces vidéos ne stimulent pas follement l’attention non plus, et le fait aussi que le texte avait probablement travaillé en moi inconsciemment (je savais tout de même de quoi il était question, il n’est pas surgi de nulle part, c’est simplement que je ne savais pas comment commencer et que rien ne fonctionnait).

En tout cas je suis excitée comme une puce avec cette découverte, et mon tapis n’est plus seulement un outil au service d’une meilleure santé : il devient un tapis magique au service de ma créativité, ce qui me motive d’autant plus pour ma séance quotidienne !