L’Impasse des rêves, de Didier van Cauwelaert

Sans le savoir, j’étais en train de répondre à sa demande. Un élan irrépressible m’avait poussé, quelques semaines plus tôt, à interrompre mes projets en cours pour exhumer ces faits intimes qui avaient sous-tendu en silence mon écriture et ma vie. J’ignorais pourquoi retravailler ces souvenirs à l’aune de mon imaginaire était devenu soudain pour moi d’une telle urgence. Quand le passé nous rattrape, faut-il y voir un appel du futur ?

Cela faisait longtemps que Didier van Cauwelaert n’avait pas publié de roman (longtemps pour lui, qui a d’habitude un rythme régulier), et alors que ses romans sortent habituellement au printemps, celui-ci s’est annoncé, un peu par surprise, pour la rentrée littéraire : il n’y avait pas besoin de cela pour attiser ma curiosité, mais cela m’a rendue encore plus impatiente de découvrir cette nouvelle cuvée, que j’ai achetée dès sa sortie et avalée dans la foulée.

Tout commence par un hasard qui a tout d’une synchronicité : le jeune narrateur, qui en est à ses débuts de romancier, envoie partout le manuscrit de Vingt ans et des poussières, n’essuyant que des refus. Mais un éditeur étourdi, au lieu de lui renvoyer son manuscrit, lui envoie à la place celui d’Anaïs, qu’il lit, tombant amoureux de l’autrice à travers ses mots : il décide alors de traverser la France pour le lui remettre en main propre, la découvrant dans une situation compliquée et… cette histoire a rebondissements durera des années, sous-tendant toute sa vie et son écriture.

Ce roman m’a profondément troublée. D’abord le début, parce que j’ai déjà écrit, il y a longtemps, quelque chose qui raconte une histoire différente mais interroge cette possibilité de tomber amoureux de quelqu’un à travers ce qu’il écrit, et la possibilité de l’écriture prédictive, qui est une de mes obsessions. Heureusement, les coïncidences se sont arrêtées là, mais j’ai également été troublées par l’ambiance qui règne sur ce roman, parfois curieusement drôle mais surtout mélancolique, et qui aborde une thématique que je n’attendais pas sus la plume de cet auteur, celle des violences conjugales.

Quant au traitement, il m’a beaucoup désarçonnée également : l’auteur y mêle l’autobiographie, nous racontant finalement toute sa vie d’écrivain et ses aventures éditoriales, ses succès et insuccès, à d’autres faits inventés (ou en tout cas, que l’on espère tels), ces faits inventés apparaissant comme des clés de lecture de toute l’œuvre du romancier, et notamment son obsession pour les triangles amoureux. Ce n’est pas la première fois qu’il fait ça, qu’il mêle le réel et le fictionnel et interroge la manière dont le réel fertilise l’imaginaire, mais je ne sais pas pourquoi, ici, cela m’a donné une drôle d’impression. Peut-être parce que le roman semble faire une boucle avec son premier (d’autant que ce premier est le dernier que j’ai lu, ou plutôt relu), qu’il paraît inhabituellement à la rentrée littéraire, et qu’il a des allures « conclusives ».

Ne nous méprenons pas : ce roman est très beau, et je l’ai immensément aimé, comme d’habitude. Il nous montre bien la puissance de la littérature, et il m’a permis de passer un excellent moment de lecture. Simplement, il me laisse une impression étrange…

L’Impasse des rêves (lien affilié)
Didier van CAUWELAERT
Albin Michel, 2025

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Portrait plan américain d'une femme châtain ; ses bras sont appuyés sur une table et sa maingauche est près de son visage ; une bibliothèque dans le fond

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