De l’Infidélité, d’Amanda Sthers

de l'Infidélité, d'Amanda SthersJe pense réellement que l’amour est ce qui constitue l’être humain. Ce sentiment tout à fait mystérieux qui fait qu’on s’attache à un autre et qu’on veut lui faire du bien, se mêler à lui, être un tout. Mais comment expliquer la jalousie qui l’accompagne ? Ce qu’on accepte volontiers en amitié : le partage, l’élargissement du cercle, est totalement exclu lorsqu’on parle de sentiments amoureux. 

Lorsqu’on réfléchit à l’amour (et c’est mon cas actuellement avec cette vaste entreprise bizarre qu’est le Truc) on ne peut pas faire l’économie de réfléchir aussi à la jalousie et à l’infidélité, et c’est donc ce que fait Amanda Sthers dans cet essai.

Sous forme d’abécédaire, d’Adultère à Zeus en passant par Andromaque, Batard, Candaulisme, Culpabilité, Don Juan, Facebook, Jalousie, Minotaure ou encore Volage, elle interroge donc l’Infidélité (et, partant, le sentiment amoureux), dans toutes ses possibles directions, à la fois en tant qu’écrivain et en tant que femme.

Très personnel, ce petit essai, très agréable à lire, est surtout éminemment riche et instructif, et ouvre de nombreuses pistes de réflexion très stimulantes (il a nourri le Truc pendant plusieurs jours). Plus de questions que de réponses au final, puisque ne pouvant définir l’amour il est difficile de dire si la jalousie et l’infidélité en sont constitutifs, surtout à notre époque où il est de plus en plus difficile de croire à un amour exclusif qui pourrait durer toute une vie (difficile, mais pas impossible). Mais les questions, c’est bien, parce que chacun probablement a ses réponses, sa manière de voir les choses, et en explorant la littérature, la psychanalyse ou encore les neurosciences, Amanda Sthers nous aide à nous les poser à nous-même.

Bref, un petit texte très enrichissant, pas forcément à lire d’une traite mais dans lequel se plonger au jour le jour…

De l’infidélité
Amanda STHERS
Plon, 2018

Dans vos librairies demain… Osez vingt histoires d’infidélité

Une nouvelle parution à ajouter à ma bibliographie personnelle : « Les Insoumis », dans le recueil Osez vingt histoires d’infidélité à la Musardine.

Pour la petite histoire, cette nouvelle n’avait pas été écrite, à l’origine, pour être érotique, mais pour un autre vague projet de recueil de nouvelles que je terminerai peut-être un jour. Mais lorsque j’ai vu le thème proposé, je me suis dit que je pouvais la reprendre un peu pour la rendre plus croustillante, ce que j’ai fait, plus d’ailleurs pour proposer quelque chose que par réelle conviction. Et puis ça a fonctionné, pour mon plus grand bonheur. En tout cas, j’espère que vous l’aimerez !

Osez vingt histoires d’infidélité (lien affilié)

L’homme qui aimait ma femme, de Simonetta Greggio

L’amour est un risque,

une menace, une bravade et une détresse, pour soi comme pour l’autre que l’on entraîne dans un processus dont on ne revient pas, où chaque foulée est sans retour, chaque promesse un serment que le temps nargue et détruit. On engage la personne aimée mais aussi celle qui nous aime sans que nous l’aimions en retour. Cela en vaut-il la peine ? De Yann ou d’Alexandre, lequel se leurre, lequel est dans le vrai ? Ni l’un ni l’autre ? Tous les deux ? Qui d’entre nous peut se dire sans s’abuser, C’est elle, c’est lui, voici la personne qui m’est destinée ? Mais sans pari, sans illusion, sans passion, sans aveuglement, sans sentiment de vérité, sans abîme de déception, quelle vie serait-ce ?

Ce roman de Simonetta Greggio faisait partie de ma sélection de Rentrée Littéraire. Sitôt sorti, sitôt acheté. Par contre, pas sitôt lu, mais enfin, on fait ce qu’on peut. Ce qui m’a interpellée : l’éditeur (je finis par faire une confiance quasi-aveugle à Stock), le résumé (même si au final je pense que la quatrième de couverture en révèle un petit peu trop), la subtile référence à Truffaut (L’Homme qui aimait les femmes pour le titre et Jules et Jim pour l’histoire).

1965. Yann rencontre Maria, et en tombe amoureux. Son frère, Alexandre, ne tarde pas à la désirer aussi…

Amour et infidélités

J’ai vraiment énormément apprécié ce roman qui alterne les points de vue, passant de celui, externe, d’Allis (dont on n’apprend qu’à la fin ce qu’elle vient faire dans l’histoire) à qui les protagonistes se confient, à ceux, internes, de Maria ou de Yann.

L’histoire se déroule sur quarante ans, et le contexte historique, surtout au début, a une importance très grande, avec ce milieu germanopratin des années 60 qui me fascine assez : les personnages sont tous des intellectuels, un philosophe, un professeur de lettres, une aspirante écrivain, et y gagnent en profondeur.

Bien évidemment, ceux qui ont lu ou liront pourront comprendre que Yann est celui qui m’a le plus touchée et en qui je me suis le plus reconnue, mais à la vérité, tous sont d’une grande profondeur, de véritables êtres, complexes, marqués par des blessures.

Extrêmement bien écrit, ce roman est tout simplement, par moments, bouleversant, il laisse sans voix, au bord des larmes voire plus loin dans l’abîme lorsqu’il touche aux sujets essentiels, l’amour, l’infidélité. Une très belle découverte donc, je ne regrette pas de m’être fiée à mon intuition.

L’Homme qui aimait ma femme (lien affilié)
Simonetta GREGGIO
Stock, 2012

La valse aux adieux, de Milan Kundera

Une ronde amoureuse

La jalousie possède l’étonnant pouvoir d’éclairer l’être unique d’intenses rayons et de maintenir la multitude des autres hommes dans une totale obscurité. La pensée de Mme Klima ne pouvait suivre une autre direction que celle de ces rayons douloureux, et son mari était devenu le seul homme de l’univers.

Depuis ma lecture de L’Insoutenable légèreté de l’être, il y avait dans ma bibliothèque cet autre roman de Milan Kundera, mais j’attendais pour le lire de sentir que le moment était venu pour moi. Un peu comme quand on attend pour ouvrir un cadeau…

Dans une ville d’eau à quelque distance de Prague, plusieurs personnages vont se croiser, se retrouver, se séparer sur une période de cinq journées.

Ruzena, une jeune infirmière célibataire qui s’ennuie dans cette ville où les hommes sont peu nombreux, et qui apprend sa grossesse au père présumé qui fut un soir son amant, un musicien célèbre, Klima ; un gynécologue farfelu ; un richissime américain malade du cœur ; la femme du musicien célèbre ; Jakub, qui a enfin obtenu l’autorisation d’émigrer et qui vient dire adieu au gynécologue et à sa pupille, Olga

Instabilité et légèreté

Ce roman n’est que mouvement, instabilité et légèreté. Et c’est un merveilleux roman !

Comme Milan Kundera sait admirablement analyser les sentiments humains ! On y retrouve les thèmes qui lui sont chers : l’amour, l’infidélité et la jalousie, l’impossible fidélité du Don Juan qui est pourtant immanquablement ramené vers sa femme après une infidélité, comme mu par un ressort ; la jalousie de l’épouse qui occupe tout son espace mental.

L’illusion et la désillusion. L’identité et la recherche de soi. L’oppression politique qui plane toujours comme un vautour.

Mais malgré la profondeur, tout cela reste d’une incroyable légèreté, car il y a malgré tout beaucoup d’humour et de gaité. C’est le genre de romans qui redonnent foi dans la vie et réenchantent le monde !

La Valse aux adieux (lien affilié)
Milan KUNDERA
Gallimard, 1976/1986 (Folio)