Le Mystère de Jean l’oiseleur de Jean Cocteau, aux Editions des Saints Pères

Comment la beauté de l’art ne ferait-elle pas triste figure devant la beauté insolente, poignante des airs à la mode et des danses de music-hall ?
En effet, ceux-ci doivent donner toute leur force d’un seul coup et céder la place, alors que l’art doit répandre la sienne peu à peu, sur un espace de plusieurs siècles.

L’an dernier, à la même époque, je vous avais parlé des éditions des Saints Pères, qui s’adressent aux bibliophiles et leur proposent de magnifiques reproductions de manuscrits originaux, avec les manuscrits de la madeleine de Proust.

Le dernier né met à nouveau à l’honneur Jean Cocteau : après le scénario manuscrit de La Belle et la bête, c’est cette fois un texte rare et émouvant qui nous est offert : Le Mystère de Jean l’Oiseleurédité à 142 exemplaires seulement en 1925 (dont 12 hors commerce que Cocteau a offert à ses amis avec un dessin original) (un rêve de bibliophile) et jamais réédité depuis.

La genèse en est particulière : en 1924, dévasté par la mort de Radiguet, Cocteau s’enferme dans une chambre d’hôtel près de Nice. Dans cette chambre, le bureau fait face à un miroir : chaque jour, l’auteur reproduit alors inlassablement son visage, que pourtant il n’aimait pas. 31 autoportraits dont 14 en couleurs, sur lesquels il appose des notes, aphorismes, ce qui lui traverse l’esprit au moment de cet exercice d’introspection. Il écrit enfin la préface, et l’envoie à son éditeur, qui lui réclamait depuis longtemps une telle œuvre.

Émouvant, intime, le travail de Cocteau, ses dessins et ses notes où se mêlent mysticisme, quête existentielle, réflexions sur la mort et l’art, intertextualité, ne peuvent que toucher.

Et ce travail, l’édition présente le met particulièrement bien en valeur (en plus de le rendre accessible pour la première fois). Dans un coffret bleu azur, étoilé d’argent, se nichent deux volumes : la reproduction intégrale du manuscrit (volume 1), et une préface de Dominique Marny, vice-présidente du Comité Cocteau, suivie d’une analyse de l’œuvre par David Gullentops et d’une version tapuscrite des aphorismes qui permet de les lire plus facilement (volume 2).

Une merveille donc, voire une double merveille : le texte est précieux, l’objet est magnifique et ravira les bibliophiles.

Le Mystère de Jean l’Oiseleur
Jean COCTEAU
Editions des Saints Pères, 2016

4 réponses à « Le Mystère de Jean l’oiseleur de Jean Cocteau, aux Editions des Saints Pères »

  1. Avatar de Sandrine
    Sandrine

    Ça doit être effectivement une très belle chose. Pas dans mes moyens, mais il me plairait de le feuilleter…

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    1. Avatar de Caroline Doudet (L'Irrégulière)

      C’est effectivement un plaisir à feuilleter !

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  2. Avatar de Debout sur mes paupières, de Jessica L. Nelson | Cultur'elle

    […] Nelson est la créatrice des sublimes éditions des Saints Pères. Elle est aussi romancière, et j’étais très curieuse de découvrir son […]

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  3. Avatar de Le crâne de mon ami, les plus belles amitiés d’écrivains d’Anne Boquel et Etienne Kern : une même âme en deux corps – Cultur'elle

    […] Hugo et Dumas, Tourgueniev et Tolstoï, Flaubert et Sand, James et Stevenson, Woolf et Mansfield, Cocteau et Radiguet, Char et Eluard, Senghor et Césaire, Mishima et Kawabata, Kerouac et Ginsberg, Vargas […]

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