Une femme regarde les hommes regarder les femmes, de Siri Hustvedt

Mais les artistes sont des cannibales. Nous dévorons d’autres artistes, et ils deviennent une partie de nous, s’immiscent dans notre chair, pour être ensuite régurgités dans nos propres travaux.

L’autre jour, je me suis rendu compte que cela faisait une éternité que je n’avais pas lu Siri Hustvedt, et notamment ses essais, alors même qu’ils me nourrissent toujours pendant des mois. Ni une ni deux, j’ai commandé celui-ci, dont le titre évidemment m’intriguait. Il a voyagé à Malaga, sur le Bassin, mais c’est finalement chez moi que je l’ai lu, car il ne s’agit décidément pas d’une lecture de vacances. Mais quelle lecture pourtant !

Il s’agit donc d’une série d’essais, qui porte le titre du premier, et comme d’habitude avec Siri Hustvedt, les sujets abordés sont nombreux, quoique toujours liés par un fil rouge. Ici, il est question de création artistique, des femmes et de leurs représentation, du corps aussi.

Ce que j’aime particulièrement avec cette autrice, c’est qu’elle pense toujours à partir d’elle-même, en tant que femme, qu’écrivaine, et en tant qu’individu ayant vécu des expériences particulières, ce qui lui permet d’aborder une multitude de thèmes et de croiser les disciplines (avec toujours un intérêt marqué pour les neurosciences et la psychanalyse, mais pas seulement), d’autant qu’elle ne sépare pas la vie et l’écriture : pour elle, c’est tout un, la femme et l’écrivaine sont deux faces indissociables de son être. Cela donne des essais foisonnants et stimulants, brillants, érudits, et en même temps accessibles car elle n’est jamais volontairement complexe, au contraire.

On apprend beaucoup de choses, les essais fourmillent de références pour aller plus loin, et surtout, ouvrent des questionnements : je pense que j’en ai pour des mois à creuser tout ce qu’elle m’a donné envie de creuser, et notamment sur la question du corps. Son essai sur Mapplethorpe notamment est venu percuter un de mes sujets de réflexion actuels, tout comme son texte sur Susan Sontag et la pornographie (je connaissais Audre Lorde sur le sujet mais pas Sontag et je pense que cela va être passionnant). J’ai beaucoup apprécié également ses réflexions sur le sexisme dans le milieu littéraire (avec des anecdotes personnelles liées à Paul Auster) et son essai sur l‘écriture thérapeutique qui, là encore, va nourrir mes propres recherches.

Encore une fois, Siri Hustvedt m’a à la fois éblouie par sa capacité à penser de nombreux sujets avec beaucoup de fluidité et d’intelligence, et stimulée moi-même intellectuellement, ce dont j’avais besoin. Si vous n’avez jamais lu les textes réflexifs de cette autrice (voire, si vous ne l’avez jamais lue tout court) et que vous avez envie de bonne nourriture pour l’esprit, je vous le conseille sans réserves.

Une femme regarde les hommes regarder les femmes (lien affilié)
Siri HUSTVEDT
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Mathieu Dumont
Actes Sud, 2019 (Babel, 2021)

3 réponses à « Une femme regarde les hommes regarder les femmes, de Siri Hustvedt »

  1. Avatar de cora85

    Merci du conseil !

    Aimé par 1 personne

  2. Avatar de Comment prendre des notes efficacement ? – Caroline Doudet

    […] lis, quelque chose vient possiblement enrichir une thématique (mettons, par exemple, un passage de Une femme regarde les hommes regarder les femmes qui parle du « sérieux » de la sexualité, alors que j’ai justement […]

    J’aime

Un petit mot ?

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Je suis Caroline !

Portrait plan américain d'une femme châtain ; ses bras sont appuyés sur une table et sa maingauche est près de son visage ; une bibliothèque dans le fond

Bienvenue sur mon site d’autrice et de blogueuse lifestyle, sur lequel je partage au quotidien ma manière poétique d’habiter le monde !