Je me souviens : les débuts d’internet

Je n’ai jamais eu de minitel. Mais internet, je l’ai eu presque à son apparition. Autour de 2001-2002.

Je venais de m’acheter mon premier ordinateur. D’occasion : il appartenait au père d’une amie qui n’en avait plus l’usage, c’était un énorme IBM qui tenait une place démente et pesait une tonne.

En réalité, ce n’était pas tout à fait mon premier ordinateur : j’en avais acheté un avec l’argent récolté pour ma communion, un Atari ST que j’ai beaucoup aimé mais qui, évidemment, était très limité. Cela dit, c’est intéressant parce qu’il n’y avait pas tant de gens que ça qui, à l’époque, avaient un ordinateur personnel. Moi, dès le début, cela m’a intéressée d’en avoir un, parce que probablement j’en sentais tout le potentiel.

Dès que j’ai eu mon IBM, ou peu après, je me suis mise en tête d’installer ce truc qu’on appelait « internet » et qui permettait… et bien je n’avais pas compris quoi, mais cela me faisait envie. J’ai pris d’abord un abonnement je ne sais plus où, puis chez AOL. Pourquoi AOL ? Vous allez rire : c’est parce que c’était le fournisseur d’accès de Carrie dans l’épisode de Sex and the City où elle découvre internet et se crée une adresse mail shoegal@aol.com ! Oui vous avez le droit de rire, mais il n’empêche que AOL est devenu Neuf puis a été racheté par SFR et que je n’a jamais changé.

Ce dont je me souviens, c’était que se connecter n’était pas simple : ça prenait un temps infini, parfois ça coupait. Il y avait cette petite musique de connexion et le « vous avez un email » très excitant parce que c’était un événement de recevoir un email et qu’on était tout content même si c’était de la pub.

Le problème était que le modem étant branché sur la ligne de téléphone, la ligne était occupée lorsque j’étais sur internet, et inversement, je ne pouvais pas me connecter si quelqu’un était au téléphone, ce qui au final était crispant pour tout le monde. Mais de toute façon, le temps de connexion était très limité. Et si on le dépassait, la facture était astronomique.

Le premier site sur lequel je suis allée, émerveillée, c’était celui de Dior.

Dès le début, l’introvertie que je suis a adoré les chats et surtout les forums : cela me permettait de discuter avec des gens sans bouger de chez moi, ce qui était une révolution. J’ai passé des heures sur les forums Aufeminin.

Je ne me souviens pas de mon premier achat. Je soupçonne néanmoins que c’était un truc sur ebay, qui a été une de mes grandes passions à une époque pour alimenter ma collection de parfums.

Très vite, j’ai créé un premier site. Je ne sais plus sur quelle plateforme. Ce n’était pas encore un blog, mais un site sur lequel j’avais mis en ligne mes mémoires de maîtrise et de DEA, et quelques projets de recherche.

Et en 2006, mon premier blog, sur skyblog, un blog encore une fois très Sex and the city : comme je ne l’ai jamais supprimé, il appartient désormais aux archives d’internet. Et j’éprouve une certaine nostalgie parce que, encore une fois, j’étais dans les premiers à faire ça, et que si j’avais persévéré aujourd’hui je serais peut-être Garance Doré. Mais on ne peut pas refaire l’histoire.

Et quand je regarde en arrière, je me dis qu’internet a vraiment été un tournant dans ma vie, que je l’ai tout de suite adopté et qu’il fait résolument partie de tous mes projets.

Et vous, vous vous souvenez de votre rencontre avec internet ?

A la main, ou à la machine ?

Ma visite au musée des lettres et des manuscrits m’a plongée dans des abîmes de réflexions métaphysiques. Ceci dit, tout chez moi est prétexte à des réflexions métaphysiques, même l’achat d’une paire de chaussures. Mais enfin, errer au milieu des écrits de nos chers génies m’a amenée à cette question : vaut-il mieux écrire à la main, ou à la machine ? Que préfère l’inspiration pour s’épanouir ? Le stylo ou le clavier ? Je sais bien, il n’y a pas de règle, mais tout de même…

Evidemment, pendant longtemps, les écrivains n’avaient pas le choix : ils écrivaient à la main, d’où le terme de manuscrit.

Et puis est venue la machine à écrire, emblème littéraire par excellence. Le tchic-tchic des touches, l’encre dont on tâche ses doigts en changeant le ruban, la page qu’on insère… tout cela fait partie d’une certaine imagerie un peu romanesque de l’auteur à son bureau. Et presque uniquement là, car de fait, même les machines portatives étaient peu transportables.

Mais l’objet lui-même est un fantasme, et je rêve d’une vieille Remington posée sur une belle table, dans un coin du salon.

Enfin, l’ordinateur est arrivé, le portable et le netbook, les tablettes qui permettent de prendre des notes n’importe où. C’est bien pratique : plus besoin de refaire toute une page parce qu’on a changé un mot ou ajouté une dizaine de lignes. Les paragraphes peuvent être coupés et collés à un autre endroit. Les corrections sont plus faciles, plus rapides, on peut multiplier les sauvegardes et éviter l’angoisse de perdre le Précieux dans un incendie, une inondation ou un cambriolage.

Aujourd’hui, aucun écrivain n’oserait remettre à un éditeur un manuscrit qui serait réellement manu-script (ou alors, un écrivain très en vue à qui on passe tous ses caprices).

Et pourtant, ils sont nombreux à écrire encore à la main, le clavier ne leur parlant pas : Paul Auster, Didier Van Cauwelaert, Amélie Nothomb vantent chacun à leur manière la sensualité de la création manuscrite. Le toucher du papier, le scritch-scritch du stylo, l’odeur de l’encre peut-être.

Ce qui est formidable, au-delà de la beauté d’une écriture qui est l’une des choses qui nous sont les plus personnelles, c’est que le manuscrit garde la trace d’un texte qui se construit. Les différentes versions, les ratures, les corrections sont tellement signifiants, et tout cela se perd avec l’ordinateur.

Et moi, dans tout ça ? Comme d’habitude, je ne choisis pas mon camp. Souvent, la première version est faite à l’ordinateur, parce que j’ai la hantise de la perte et que j’ai besoin pour être tranquille que chaque texte soit enregistré sur mes deux ordinateurs, mon disque dur portable et cinq clés USB (je vous ai déjà dit que je suis une grande angoissée ?).

Mais je corrige à la main, et comme je corrige beaucoup (souvent chaque page tapuscrite est doublée d’une page de corrections à la main) cela donne un texte hybride, avec des collages, des flèches, des renvois, un code de couleurs compris de moi seule.

Et il y a mon carnet Moleskine. J’ai toujours eu la passion des petits carnets mais depuis que je me suis offert ce mythique petit livret en cuir noir, j’ai acquis le réflexe d’y noter mes pensées les plus diverses. Cela donne un objet étrange, à la fois journal intime, recueil de citations et couveuse pour bribes de textes en devenir.

Et il est vrai que j’aime beaucoup cette sensualité qu’il y a à coucher ses réflexions dans un objet que l’on peut avoir toujours sur soi et sortir à n’importe quel moment. Par contre, si je le perdais, ça serait un vrai drame…

Et vous alors ? A la main ou à la machine ?