Mulholland Drive, de David Lynch

« I don’t know who I am. I don’t know what my name is ».

Contrairement aux apparences, je ne me fais pas une totale rétrospective David Lynch, mais après Sailor et Lulaj’avais très envie de revoir ce qui reste pour moi son chef-d’œuvre et un chef-d’œuvre du septième art, Mulholland Drive. 

Victime d’un accident de voiture, une mystérieuse femme, amnésique et blessée, erre sur Mulholland Drive. Elle se réfugie dans la première maison qu’elle trouve, l’appartement de la tante de Betty, jeune comédienne qui vient de débarquer à LA dans l’espoir de faire carrière.

Intriguée par cette inconnue qui se fait appeler Rita, Betty, en tentant de l’aider à retrouver la mémoire, découvre dans son sac des liasses de dollars et une mystérieuse clef bleue. Les deux jeunes femmes mènent l’enquête pour retrouver la véritable identité de Rita.

Ce film a tout l’air d’un thriller, et pourtant ce n’en est pas un. En fait, c’est selon moi un film qui doit se voir au moins trois fois : une première fois de manière totalement naïve. Certains (beaucoup) s’arrêtent là, vitupérant contre l’hermétisme de Lynch qui fait qu’à moins d’être un génie, au moment où commence le générique de fin, on se dit qu’on n’a rien compris.

Mais il ne faut pas s’arrêter là. Il faut le revoir avec quelques clés, il existe d’excellents sites internet qui proposent quelques explications éclairantes (mais parfois contradictoires entre elles) et qui peuvent orienter la manière dont on voit le film.

J’ajouterai néanmoins une nuance : pour moi la plus grosse erreur est justement de vouloir absolument une explication qui ferait que toutes les pièces du puzzle s’assemblent. Elles ne s’assemblent jamais de manière totalement cohérente et quelle que soit la piste choisie, comme avec Inceptioncertains éléments ne concordent pas.

C’est selon moi le pacte qu’il faut accepter : ce film est un rêve, et comme tous les rêves, les significations sont démultipliées à l’infini. Et c’est bien ce qui est fascinant : toutes les explications que j’ai pu lire sont totalement cohérentes et pertinentes d’un point de vue externe, mais elles ne s’excluent pas les unes les autres, elles se superposent, en prenant en compte des éléments différents ou en interprétant de manières différentes un même élément.

Il faut donc voir le film une troisième fois. Sans se focaliser sur le sens. Juste pour savourer le génie créateur de Lynch. Les vues absolument fascinantes de LA, la nuit, qui révèlent une véritable jouissance du réalisateur à filmer cette ville. Le rythme lent, presque hypnotique de certaines scènes qui se passent presque totalement de paroles et même de son.

L’importance des regards. Le surgissement inopiné de quelques scènes totalement loufoques dans un film qui est loin de l’être. Les objets qui reviennent à l’identique ou avec de légères variations. La beauté époustouflante du couple Watts/Harring, toutes deux lumineuse, l’une dans le versant solaire et l’autre dans le nocturne.

Un chefs-d’œuvre, à voir, à revoir, à rerevoir…

Mulholland Drive
David LYNCH
France/Etats-Unis, 2001

16 réponses à « Mulholland Drive, de David Lynch »

  1. Avatar de Alpha
    Alpha

    Je l’avais dit dans un précédent commentaire à propos de Sailor… Lynch est un « artiste contemporain », pas un cinéaste. Il ne propose pas une œuvre dramatique, mais un objet mal identifié qui ne communique rien que sa propre incohérence laquelle se donne pour onirique. Mais franchement, alors qu’il a eu un contrôle total sur son film, arriver à quelque chose qui ne veut rien dire de plus qu’un gros blockbuster trafiqué mille fois depuis le projet initial par une armée de producteurs débiles et d’analystes soucieux de flatter tel ou tel fragment de la population au mépris de la dramaturgie aristotélicienne, c’est triste, et bien dans la façon des tenants de l’AC. « Vous ne faites pas l’effort de comprendre » : faux : c’est le grrrrrand artiste qui ne fait pas l’effort de raconter quelque chose d’intelligible ; posture insupportable, propre à ébaubir les snobs. En plus, le film respire l’ennui parce qu’il leurre le public avec un semblant d’histoire bidon. Alors que tant qu’à filmer un rêve sans très grande histoire, il pouvait filmer ses deux superbes actrices occupées à bien d’autres choses…

    J’aime

  2. Avatar de Sandrine(SD49)

    J’en suis restée à la première étape : je n’ai rien compris !!!!! et pas très envie de le revoir

    J’aime

    1. Avatar de L'Irreguliere

      La première fois c’est normal de n’avoir rien compris

      J’aime

  3. Avatar de dominique

    Je l’ai vu deux fois et il me semble avoir compris pas mal de choses. Presque tout en fait, en ce qui concerne les deux femmes, leurs vraies relations, leurs vraies identités, ce qui s’est réellement passé entre elles, ce qui dans la première partie est déformé puisque cette partie est un rêve.
    Mais je n’ai pas trop bien saisi les rôles de certains personnages secondaires et je trouve aussi que le cinéaste est agaçant dans ce film : tout se passe comme s’il intervenait tout le temps pour dire c’est moi qui tire les ficelles…

    J’aime

    1. Avatar de Alpha
      Alpha

      Pour s’emmêler avec, en plus.

      J’aime

    2. Avatar de L'Irreguliere

      Oui, je vois ce que tu veux dire, mais justement moi j’aime bien cette espèce de métadiscours

      J’aime

  4. Avatar de Valérie

    J’ai adoré voir et revoir ce film qui fait partie de mes films cultes.

    J’aime

    1. Avatar de L'Irreguliere

      Culte, c’est le mot !

      J’aime

  5. Avatar de Thot Hemron

    Lynch est un génie du septième art (qui en compte quelques autres tout de même, ouf !) et pas seulement. Son art transcende les genres. Il s’est construit un mythe car son cinéma est largement onirique et par conséquent effectivement interprétable à l’infini. J’ai malheureusement constaté que peu dans mon entourage (pourtant fans de ciné) goûtent son univers. Il faut avoir gardé une bonne part d’enfance pour se laisser transporter par le maître et posséder un solide goût esthétique. Je suis mille fois d’accord avec tes commentaires. Je fais un parallèle avec un autre film que j’adore et qui reste pour beaucoup une énigme : 2001 : l’Odyssée de l’espace de Kubrick. Bien que ne partageant que peu de similitudes d’un point de vue cinématique, l’ambiance dominante téléporte dans la même micro dimension ; Nous glissons dans une faille spacio-temporelle qui nous dépose dans une galaxie des sens, des émotions, de l’indicible…Seul l’entendement prédomine. Ces œuvres doivent être ressenties et non expliquées.
    Thot

    J’aime

    1. Avatar de L'Irreguliere

      C’est amusant parce que je pensais justement à Kubrick, mais à Eyes wide shut plutôt…

      J’aime

  6. Avatar de Small Stories de David Lynch, à la maison européenne de la photographie | Cultur'elle

    […] Jeudi, en me baladant dans le Marais, je me suis dit "tiens, si j’allais voir à la maison européenne de la photographie s’il y a quelque chose d’intéressant à voir ?". Il y avait : une exposition de photographies de David Lynch, réalisateur dont l’univers me fascine. […]

    J’aime

  7. Avatar de Guy
    Guy

    Un petit mot ?
    oui oui ! et d’accord avec le commentaire de Thot….
    ce film ? je l’ai vu 3 fois avant de comprendre que les visions multiples ne peuvent pas se « laisser faire » en une seule fois !
    On ne peut pas appréhender la vérité en une fois il faut REVOIR !
    Ou alors on reste sur l’idée d’un film esthétique et …dérangeant.
    La vision du cadreur , la post production au travers de l’idée de Lynch nous jouent des tours
    Il y a multiplicité de visions dans la durée il est impossible d’être raccord entre le début et la fin ( je n’ai pas su ) .
    Et même, une conclusion globale est fragile, c’est aussi ça l’intelligence et le grain de folie/génie de Lynch !
    Bonne idée cette note de 2013 , je vais devoir acheter le dvd… arf
    Ce film est incontournable

    J’aime

    1. Avatar de irreguliere

      Oui, je le revois de temps en temps !

      J’aime

  8. Avatar de Twin Peaks – Fire walk with me, de David Lynch | Cultur'elle

    […] et fascinant, le film ressemble beaucoup par moments à Sailor et Lula et contient en germe Mulholland Drive. Le film plaira sans aucun doute aux amateurs de Lynch, les autres critiqueront encore une fois […]

    J’aime

  9. Avatar de Twin Peaks – Fire walk with me, de David Lynch – Caroline Doudet

    […] et fascinant, le film ressemble beaucoup par moments à Sailor et Lula et contient en germe Mulholland Drive. Le film plaira sans aucun doute aux amateurs de Lynch, les autres critiqueront encore une fois […]

    J’aime

Répondre à Twin Peaks – Fire walk with me, de David Lynch – Caroline Doudet Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Je suis Caroline !

Portrait plan américain d'une femme châtain ; ses bras sont appuyés sur une table et sa maingauche est près de son visage ; une bibliothèque dans le fond

Bienvenue sur mon site d’autrice et de blogueuse lifestyle, sur lequel je partage au quotidien ma manière poétique d’habiter le monde !