Vingt-Quatre heures d’une femme sensible, de Constance de Salm

Mon amour, mon ange, ma vie, tout est trouble et confusion dans mon âme ! Depuis une heure entière, j’attends, j’espère. Je ne puis me persuader que tu ne sois pas venu, que tu ne m’aies pas au moins écrit quelques lignes, après cette fatale soirée. Il est une heure… peut-être es-tu encore chez cette femme !… Quelle nuit je vais passer ! Ah ! mon Dieu ! je n’ai pas une pensée qui ne soit une douleur. Le ciel sait que le moindre doute sur ta tendresse me paraîtrait une horrible profanation ; mais n’est-ce donc rien que ces longues heures de désespoir ?

Voilà un roman dont la postérité est particulièrement intéressante : publié en 1824, il a jouit d’un certain succès, avant de tomber dans l’oubli. Ce n’est qu’en 2007 qu’il en est sorti, un peu par hasard, grâce aux éditions Phébus. Cela fait plusieurs années qu’une amie me l’avait conseillé, sans que je prenne le temps de m’y pencher (il est pourtant très court). Quel dommage !

Une femme du monde a vu son amant partir de l’opéra avec une autre femme. Folle de jalousie, elle passe les vingt-quatre heures suivantes à lui écrire des lettres que vraisemblablement il ne lira pas, passant par tous les états, à mesure que les informations contradictoires sur ce qui a pu se passer lui parviennent…

Si le titre fait bien évidemment penser à Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme  de Zweig, le ton et le procédé narratif rappellent plutôt Lettre d’une inconnueimmédiatement, le texte nous plonge dans l’âme d’une femme amoureuse, passionnément amoureuse, et toute la palette de cet état s’offre à nos yeux : la jalousie, la douleur aux accents tragiques qui ne sont pas sans rappeler Phèdre, « Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire », le délire interprétatif qui fait signe de tout.

Parfois, la raison reprend le dessus, mais pour peu de temps.

L’œuvre a une visée morale : contemporaine de Mme de Staël, Constance de Salm examine, tout comme elle, l’effet funeste des passions sur le bonheur et leur pouvoir de destruction. La narratrice, entièrement emportée par sa jalousie, commet bien des imprudences qui auraient pu avoir de graves conséquences. Néanmoins, ce n’est pas forcément ce qui touche le lecteur contemporain, mais les affres d’une âme amoureuse, entièrement dévouée à sa passion, et qui remue bien des sentiments.

Un roman à découvrir, assurément !

Vingt-Quatre heures d’une femme sensible
Constance de SALM
Flammarion, 2012

12 réponses à « Vingt-Quatre heures d’une femme sensible, de Constance de Salm »

  1. Avatar de Lectures Gourmandes
    Lectures Gourmandes

    Je note ! Merci pour cette découverte 🙂

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  2. Avatar de Catherine

    J’ai envie de decouvrir les 2 ( celui de Zweig) et celui ci et puis j’avais envie de lire la femme de 30 ans de Balzac egalement. Que d’ecrits a propos/sur les femmes!

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    1. Avatar de Caroline Doudet (L'Irrégulière)

      Oui, c’est passionnant comme sujet !

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  3. Avatar de Mind The Gap

    Oh, il me plait celui-ci. Je n’en ai jamais entendu parler mais les classiques français et moi on est pas amis…j’aime l’épistolaire en plus. Noté !

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  4. Avatar de Violette

    inconnu pour moi ! ça me tenterait bien!

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    1. Avatar de Caroline Doudet (L'Irrégulière)

      Ce n’est pas très connu, et c’est dommage !

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  5. Avatar de nathalie

    Trouvé par hasard, j’avais beaucoup aimé. En relisant mon billet, je vois que j’avais pensé à Stendhal qui dissèque les souffrances de l’amour trahi. Et c’est une folie d’écriture, que de d’essayer de décrire cette douleur !

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    1. Avatar de Caroline Doudet (L'Irrégulière)

      Oui, c’est vrai, il y a comme un air de Stendhal, maintenant que tu le dis !

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  6. Avatar de La valise de l’été 2018 – Cultur'elle

    […] poche français : 24h d’une femme sensible de Constance de Salm. Je triche un peu, parce que dans cette catégorie je devrais vous proposer du contemporain mais je […]

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  7. Avatar de Lovesick (complètement fou), de Luke Matheny – Caroline Doudet

    […] L’idée de base de cette comédie, c’est que l’amour romantique et la psychose ont beaucoup à voir l’un avec l’autre : l’amour perturbe les connexions neuronales, et l’amoureux est donc toujours plus ou moins délirant ; mais chez certaines personnes, les plus romantiques et celles dont l’imagination est exacerbée (genre, un écrivain ?), les débuts d’histoires sont une véritable torture, et l’amour les rend carrément psychotiques. […]

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