Les Dames du Lac 1&2 de Marion Zimmer Bradley : la puissance de la Déesse

Tout appartient à la Mère Déesse, tout lui est soumis. Sans elle, nous ne pouvons ni exister, ni subsister. Et lorsqu’enfin vient pour chacun de nous le temps de la mort, pour que d’autres, après nous, puissent trouver leur place sur cette terre, c’est encore la Déesse qui décide et ordonne. Non, elle n’est pas seulement la Dame Verte de la terre fertile, de la semence qui attend patiemment sous la neige, mais aussi la Dame Noire, celle qui commande aux corbeaux et aux vautours qui annoncent la mort et le retour aux profondeurs de la glèbe. Mère de toutes fins et de tous commencements, pourvoyeuse de vie, mère du ciel et des étoiles, Elle est tout, est et demeure à jamais en chacun de nous…

Après avoir lu (ou relu : le mystère demeure) La Trahison des dieuxje me suis dit que tiens, je relirais bien aussi Les Dames du Lac ! Le fait est que le cycle d’Avalon (les trois premiers, je n’ai pas lu les autres mais ça viendra) fait vraiment partie de mon histoire, que je l’ai lu un certain nombre de fois dont une première quand j’avais 15 ans, et que ce ne fut pas anodin concernant mes choix de vie et ma vision du monde.

Alors j’ai appris depuis que malheureusement la version française n’est pas une traduction mais une adaptation, en tout cas celle que j’ai (elle est ressortie récemment, je ne sais pas ce qu’il en est), mais tant pis.

Après avoir enterré son frère Arthur dans l’île sacrée d’Avalon, et alors que l’ancien monde se sépare de plus en plus du monde chrétien, Morgane prend la parole. L’histoire qui va être racontée est l’histoire telle qu’elle s’est vraiment passée, une histoire où les femmes ont le premier rôle.

Encore une fois, c’est l’histoire d’un monde en train de changer et de basculer qui nous est narrée : le passage du culte païen de la Grande Déesse, plein de vie et de sensualité, au culte triste du christianisme, où les femmes deviennent des esclaves et où l’amour dans sa dimension charnelle et sacrée est pourchassé comme un crime : la nature, la pulsion de vie s’oppose à un ordre rigoureux animé par une pulsion de destruction.

Oui, je suis sévère parce qu’à chaque fois, ce roman réactive ma colère contre cette religion, contre la manière dont elle a détruit les cultes antiques et en a fait des parodies, et bien sûr la manière dont elle traite les femmes. Parce que, bien sûr, même si c’est globalement anachronique, on en arrive à la figure de la sorcière, de la femme pourchassée pour sa liberté et sa vitalité, et Morgane est une sublime incarnation de cet archétype du féminin puissant, druidesse, sorcière et guérisseuse.

Et je crois que cette sorcière, je l’ai été tellement de fois dans mes vies précédentes que ma colère palpite — mais j’en parlerai un autre jour, de ces peurs archaïques. Mais une chose tout de même parce que vers la fin, Morgane prophétise quelque chose d’essentiel

Dans les années qui viennent, les prêtres vont apprendre à l’humanité ce qui est bon et ce qui est mal, ce qu’il faut penser, ce qu’il faut croire, comment il faut prier. Et cela va durer très longtemps… Mais peut-être les hommes doivent-ils connaître une longue période de ténèbres pour redécouvrir, un jour, la Lumière ! 

Et je crois qu’on y est, à ce moment où tout bascule à nouveau, où la Lumière réapparaît, celle du Graal qui n’est autre que… l’amour. L’idée d’ailleurs qui prévaut dans le roman est d’abord que toutes les divinités sont unes, et que la Grande Déesse a survécu malgré tout (ça c’est un chapitre de ma thèse).

Bref : les deux romans sont magnifiques, palpitants de sensualité, et en donnant leur vraie place aux femmes, ils montrent aussi comment, de toute éternité, c’est l’amour le seul moteur du monde, et la seule véritable religion.

A lire si vous ne connaissez pas, c’est une réécriture intéressante de l’histoire des chevaliers de la Table Ronde et vous n’êtes pas obligé en le lisant de vous faire comme moi des nœuds au cerveau. De mon côté, je vais me pencher sur la suite du cycle dans laquelle je suis sûre que je vais trouver de nouveaux sujets de réflexions, dont nous reparlerons évidemment !

Les Dames du lac / Les Brumes d’Avalon (liens affilié)
Marion ZIMMER BRADLEY
Pygmalion/Gérard Watelet, 1986-1987

8 réponses à « Les Dames du Lac 1&2 de Marion Zimmer Bradley : la puissance de la Déesse »

  1. Avatar de Syl.

    17 ans et beaucoup de magie dans la tête ; j’avais adoré !

    J’aime

    1. Avatar de Caroline Doudet

      Oui, mais en vieillissant je trouve qu’on y voit d’autres choses !

      J’aime

  2. Avatar de Les dames du Graal, de Jean Markale : la coupe et l’épée – Cultur'elle

    […] mes recherches sur le Graal, l’alchimie, le féminin tout ça, parallèlement aux romans de Marion Zimmer Bradley, je me suis lancée dans la relecture des essais de Jean Markale, un homme fascinant, spécialiste […]

    J’aime

  3. Avatar de Le secret d’Avalon, de Marion Zimmer Bradley : l’Autre Monde – Cultur'elle

    […] continue donc avec le cycle des Dames du Lac, et ce roman que j’avais lu aussi lorsque j’étais jeune adulte (mais une seule fois). […]

    J’aime

  4. Avatar de Le lit d’Aliénor, de Mireille Calmel : l’amour est le plus grand pouvoir – Caroline Doudet

    […] dit le pieu. Un roman très sensuel et envoûtant, qui m’a souvent rappelé la série des Dames du lac de Marion Zimmer Bradley dans ses thématiques, m’a donné du grain à moudre pour mes recherches, et m’a fait […]

    J’aime

  5. Avatar de Damna, de Carine Geerts – Caroline Doudet

    […] une forte intertextualité avec des textes qui ont influencé mon propre imaginaire, notamment Les Dames du lac de Marion Zimmer-Bradley (là j’en suis sûre) et Les Infortunes de la Belle au Bois dormant d’Anne Rice (là […]

    J’aime

  6. Avatar de Les dames du Graal, de Jean Markale : la coupe et l’épée – Caroline Doudet

    […] dans mes recherches sur le Graal, l’alchimie, le féminin tout ça, parallèlement aux romans de Marion Zimmer Bradley, je me suis lancée dans la relecture des essais de Jean Markale, un homme fascinant, spécialiste […]

    J’aime

  7. Avatar de Le secret d’Avalon, de Marion Zimmer Bradley : l’Autre Monde – Caroline Doudet

    […] continue donc avec le cycle des Dames du Lac, et ce roman que j’avais lu aussi lorsque j’étais jeune adulte (mais une seule fois). […]

    J’aime

Répondre à Les dames du Graal, de Jean Markale : la coupe et l’épée – Cultur'elle Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Je suis Caroline !

Portrait plan américain d'une femme châtain ; ses bras sont appuyés sur une table et sa maingauche est près de son visage ; une bibliothèque dans le fond

Bienvenue sur mon site d’autrice et de blogueuse lifestyle, sur lequel je partage au quotidien ma manière poétique d’habiter le monde !